Updated on octobre 9, 2019
Cadavres exquis d’une voyageuse #2
Le pouce tendu, je tâche de sourire. Je me dis que ça va être difficile de trouver une voiture aujourd’hui. La gorge serrée, je me concentre sur celles qui passent. Ils tournent tous à gauche. Est-ce que je ne devrais pas mieux marcher un petit peu ? Au fond si personne ne me prend, j’aurais une nouvelle excuse pour contacter G.
Une voiture. Le gars part de mon côté. Parfait!
Comme à mon habitude je me présente et j’oublie ausitôt le nom que l’on me donne. Ça ne me ressemblait pas il y a quelques temps, moi qui mettait toujours un prénom sur un visage. Aujourd’hui, j’ai du mal à me souvenir des histoires que l’on me raconte… et pourtant je m’attache.
Après 2h de route, le gars me dépose et je me retrouve dans une auberge, qui s’avère être un Holiday Park, où les gens passent leur temps dans leur camping-car. Je suis donc seule dans une chambre de 10 lits. Il y a 5 mois j’en rêvais. Il y a 5 mois, je voulais faire un break, m’enfermer dans une pièce où personne ne serait là pour m’emmerder. Il y a 5 mois je n’avais qu’une envie: être seule au moins une soirée. C’était mon burn out… mon burn out du voyage, qui a fini par passer. Et depuis, j’ai fait de nouvelles rencontres.
Ce qui m’a marqué sur ma première escapade en solo, c’était ces gens inconnus qui s’arrêtaient au milieu de leur route pour venir me demander si, ma carte sous les yeux, je cherchais mon chemin.
Aujourd’hui les gens que je croise ne sont plus des inconnus mais différents morceaux de vie que j’ingurgite. Les collègues, les gens qui me prennent en stop, les couchsurfeurs, les voyageurs, les personnes que je croise sur les sentiers de randonnée et tous les autres avec qui j’échange un sourire.
Mon voyage ne serait pas aussi riche sans ces rencontres.
Mais il ne serait pas aussi dur non plus.
Quand je quittais Toulouse pour Paris et vice-versa, je savais très bien que je les reverrai. Que dans quelques mois, on se retrouverait autour d’un café, dans une expo ou sur une ville totalement différente, histoire de bouger un peu en France. Aujourd’hui à l’autre bout du monde, mes rencontres se sont diversifiées… géographiquement.
La plupart des couchsurfeurs qui m’accueillent sont néo-zélandais. Les voyageurs que je croise en auberge ou autres pvtistes sont majoritairement européens. C’est cool, tu te dis que ça te fera un pied à terre dans les pays voisins, quand tu reviendras en France… sauf que je ne suis pas prête à rentrer au pays. Avec eux, je partage un repas, des soirées, quelques jours de voyage, des semaines de boulot, un appart, un bout de vie…
Les rencontres sont différentes avec pour chacune d’elle son degré d’attachement. Il y a les légères, où l’on se dit qu’ “on reste en contact, qui sait on se recroisera peut-être ?”. Les rencontres plus fortes, où on fait tout pour se recroiser et celle qu’on continue à construire et alimenter au gré du voyage. Il y a aussi ces coups de coeur amicaux où tu n’as même pas le temps de dire au revoir.
Ces différentes personnalités qui échangent, qui s’entraident, qui me rendent ma foi en l’humanité, c’est génial et intense. Mais au final quand on a choisi d’être nomade, ces rencontres là, tu te dois de les quitter. Il y a un moment donné où nos chemins se séparent et souvent trop vite. Parce qu’on a des objectifs différents, des envies à suivre souvent plus fortes que nos coups de cœur affectifs.
La boule au ventre je m’éloigne de la voiture. Je me demande si je devrais partir avec eux. Je rentre à l’auberge les larmes aux yeux, haïssant le voyage.
Il a encore fallu que je les quitte… pour mieux les retrouver vous me dites ?
Je me dis souvent que mon fort besoin de découverte me fait passer à côté de belles choses avec les personnes que j’apprécie. Mais c’est un choix… que je remets souvent en question d’ailleurs mais que je contre-balance en me disant qu’une personne quittée, c’est une nouvelle ouverture à l’inconnu. Et c’est tellement vrai. A peine mes derniers échanges posés sur mon carnet, c’est un nouveau chapitre que j’entrouve avec de nouvelles rencontres.
Et vous, comment le viv(ri)ez-vous ?
Je comprends tout à fait ces sentiments mêlés : j’ai rencontrés des gens très chouettes à mon arrivée à Auckland, mais j’ai décidé de ne pas rester, un peu de voyages dans l’île du nord, puis arrivée à Wellington je me suis sédentarisée, et là je me suis fait des amis qui ne sont pas restés (en auberge, au travail). Des hauts (très hauts) et des bas (très bas)… Ne pas savoir si on a envie d’être seule ou entourée certains soirs … L’affection vient vite et je crois que c’est dû à l’insécurité de la situation dans laquelle on se met … Perso la colocation m’a aidée à ma stabiliser surtout que j’ai des colocs du tonnerre à la maison 🙂
La magie des rencontres 😉 Je pense que l’affection vient vite car l’on sait justement que ça sera court. En voyage j’ai l’impression de vivre plus intensément ces rencontres, pas toi ?
J’imagine qu’avoir des colocs du tonnerre, ça aide à se stabiliser. Je serai sur Wellington en février… on se retrouve autour d’un verre ?
Oui puis je pense qu’on est un peu en mode « je me lâche » puisqu’il n’y a plus le même cadre autour de nous … Je m’attache très vite et en effet je vis les choses de manière plus forte … Tient moi au courant pour février ce sera avec plaisir si je suis encore sur place 🙂
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