Rocheuses canadiennes : un été rythmé par les randonnées

J’ai mis du temps à les aimer ces montagnes. Nues, escarpées… j’avais du mal à en épouser leur forme. Étais-je encore mélancolique des Pyrénées ? Puis j’ai eu la chance d’y travailler tout l’été et les Rocheuses canadiennes sont devenues un terrain de jeu d’excellence. Retour en image sur ces randonnées qui ont marqué ces derniers mois.

Boucle autour du Lac Louise : un classique des Rocheuses canadiennes

C’est officiellement l’été lorsque j’emprunte le chemin qui mène du lac Louise au lac Agnès, au cœur du parc national de Banff. J’ai pourtant récupéré au passage les crampons d’une amie. Le sentier en gravier est très fréquenté mais certains morceaux sont encore recouverts par la neige. Après une bonne grimpette en doublant la foule, je m’éloigne un moment pour rejoindre « little beehive« , un petit sommet qui offre une vue sur le célèbre lac si l’on cherche un peu. J’en comprends mieux les beautés. Je continue de prendre de la hauteur pour découvrir le panorama qui se dégage du « big beehive ». Le point de vue est encore plus majestueux et la couleur irréelle du lac s’observe enfin.

Je n’ai pas encore envie de redescendre. La journée est fraiche et je décide de pousser un peu vers la plaine des six glaciers (« the plain of 6« ). J’emprunte un chemin plat en solitaire et rejoint la dernière montée, glacée. Il y a eu du passage mais les traces de pas me guident sur le pierrier. J’arrive à la maison de thé. Ils ont ouvert la veille et me proposent d’entrer. Il est déjà tard. J’en profite pour questionner la serveuse sur son métier. Dormir dans une petite cabane, coupée de tout, me vend du rêve. J’avale rapidement mon chocolat chaud et propose de redescendre quelques poubelles, avant de me perdre sur le chemin du retour, en suivant bêtement les randonneurs devant moi.

Little Lougheed : petit sommet dans les Kananaskis

Je connais déjà cette route qui mène jusqu’au départ du sommet Ha Ling. Je l’ai faite au printemps dernier alors que je venais d’arriver dans les Rocheuses. Il faut un peu de patience sur cette route non goudronnée, mais le Spray Lakes Reservoir nous invite toujours à contempler ses belles couleurs. Arrivés au départ de notre randonnée du jour, on s’engage dans la forêt. La petite rivière que l’on longe me ramène tout droit en Tasmanie sur l’Overland Track, lors d’une journée de pluie. Le sentier grimpe doucement sous les pins que l’on quitte pour du pierrier. La pente s’accentue et je laisse mon co-équipier à quelques mètres du sommet pour le gravir en solitaire. Personne à l’horizon !

Lac Elbow : deux jours dans l’arrière-pays

Le couchsurfing me permet encore de faire de belles rencontres. On se retrouve avec M. sur le parking du supermarché de Canmore. J’ai trouvé un covoiturage à la sortie du boulot au départ de Lac Louise. Le timing est parfait… car j’ai encore quelques affaires à ranger. On s’est décidé au dernier moment avec M. et ce soir, on monte le camp au camping du Lac Elbow. La route est encore longue à partir de Canmore et on finit par marcher de nuit sur le large chemin menant au lac. Il est 23h, on arrive à minuit.

On monte la tente parmi les places désertées par les autres campeurs et on s’accoutume à laisser notre nourriture dans les casiers attitrés. Ils sont loin des tentes et il ne faut rien oublier. Le dentifrice, la crème solaire… j’y glisse les produits qui pourraient attirer les ours dans ces abris de métal. Le matelas gonflé, M. me laisse son sac de couchage car je ne suis pas équipée. J’ai tout laissé en France, pensant que la vie citadine me conviendrait ici.

Lacs Tombstone et grizzli

Le réveil se fait lent et on décide de s’aventurer vers les lacs Tombstone à quelques kilomètres de là. La chaleur d’un mois de Juillet dans les Rocheuses canadiennes prend le dessus. L’avancée se fait à pas lourds et on finit par se glisser dans les eaux du premier lac. Le deuxième nous accueille pour une pause photo avant de rebrousser chemin vers notre campement.

M. me fait sourire avec son équipement. Bombe à ours à droite et couteau à gauche. On avance parmi les feuillages papotant gaiement. Alors que nous empruntons un sentier entre les arbres plutôt serrés, un grognement nous arrête net. J’aperçois la tête énorme d’un grizzli en train de nous charger ! Ma vie n’a pas le temps de défiler. J’accepte la mort, satisfaite d’avoir rempli mes années d’existence, d’expériences inédites. M. a déjà dégainé sa bombe à poivre. J’essaie désespéramment de saisir la mienne, calée sur le côté de mon sac. Je veux m’écarter du chemin mais M. a pris le seul spot disponible… alors je tourne le dos au grizzli me sauvant de peu de la bombe à ours dans les yeux. Cependant mes poumons accusent le choc et tout en rigolant de la situation, je m’étouffe pendant des minutes éternelles.

M. me raconte que le grizzli est parti avec ses petits. Après avoir repris mon souffle, nous continuons notre randonnée en parlant plus fort pour nous donner du courage. Cet échange bloque mes pensées et nous nous remettons doucement de nos émotions sur le trajet retour.

Glacier Rae et ombrage

La nuit est agitée et le réveil difficile. La chaleur s’est engouffrée dans la tente et on hésite à partir randonner. Je propose de prendre la direction du glacier Rae et à notre belle surprise, le sentier est ombragé. On grimpe doucement en suivant un cours d’eau, dont on apprécie la fraicheur salvatrice. Petite pause au lac avec le glacier en ligne de mire, et cette randonnée estivale dans les Rocheuses canadiennes prend fin.

Takkakaw, Iceline et lac Emerald : les joyaux du parc national de Yoho

Cette fois-ci, je me laisse embarquer par deux collègues : « Lucie, ça te dit un petit tour sur la Iceline en dormant une nuit à Little Yoho ? ». Difficile de ne pas parler franglais quand on vit du côte anglophone ! J’emprunte un sac de couchage, je mets deux-trois victuailles pour une nuit en cabane et c’est parti pour du covoiturage. Au départ des chutes Takkakaw que j’ai longtemps recommandé sans en avoir vu la couleur, on marche sur un sentier presque plat en direction des « Laughing falls ». Le temps est plutôt couvert.

On emprunte la vallée de la Yoho jusqu’aux chutes twins. La Whaleback nous ramène vers la rivière Little Yoho que l’on suit jusqu’à notre abri du soir. À peine arrivées, les gouttes grossissent et on doit utiliser nos trois cerveaux pour ouvrir la porte. Le lendemain, le soleil est de la partie. On s’engouffre sur la iceline, nous offrant des paysages lunaires. Lacs d’un blanc laiteux, glaciers à perte de vue… on avance sur un sol sableux. On regrette presque notre petit détour jusqu’au lac Céleste. Il faut remonter la pente après le déjeuner ! Finalement, le pas rythmé, on atteint le point culminant de la randonnée avant de la prolonger jusqu’au lac Emerald. Le cocktail d’arrivé est alors bien apprécié.

Tent Ridge : panorama d’été sur les Rocheuses Canadiennes

C’est reparti pour les Kananaskis ! C’est vraiment un coin que j’adore, loin de la foule et du tourisme de masse, avec quelques randonnées pleine de challenge. Je m’engage sur Tent Ridge avec une collègue. C’est mon premier « scramble » dans les Rocheuses Canadiennes et je n’en comprends pas encore la définition. La vue est splendide sur le lac Spray au loin. Le ciel semble rempli de fumée, bouchant un peu les beautés matinales. La crête se dessine doucement et après une bonne marche dans la forêt, je me rends compte de ce qui nous attend. On grimpe légèrement avec les mains. Le sentier étant bien dessiné, il parait plus imposant de loin. D’en haut, les épineux et la roche dénudé s’affirment, offrant des contrastes saisissants sous les nuages menaçant. On zigzague sur la boucle de crête, puis on termine la journée autour d’un diner dans ma ville préférée : Canmore.

Stanley glacier, Paints Pots et Marble Canyon : 3 courtes randonnées dans les Kootenays

Je me suis portée volontaire pour une journée à Stanley Glacier. Parks Canada propose des randonnées guidées qui nous emmènent à la découverte des « Burgess Shells » ou schistes de Burgess, de rares sites qui contiennent les meilleurs fossiles d’animaux de Cambrien au monde.

Après une courte marche en forêt, on rejoint les roches et la vue sur le glacier, où une chasse aux fossiles est lancée. Ici, tout doit être remis à sa place. On se prend rien du parc national et le guide nous raconte l’histoire de ces fossiles, vieux de plus de 500 millions d’années, témoins de l’un des premiers écosystèmes marins.

En route vers le Lac Louise, d’autres randonnées méritent le détour à l’image des Paints Pot et Marble canyon.

Circle Peak : un mix de couleurs

Circle Peak est considéré comme un autre « scramble ». J’en déduis que les randonnées qualifiées de la sorte nous amènent sur des terrains dégoulinants de cailloux ou devant de gros rochers, où l’usage des mains est souvent nécessaire.

Il est 12h quand nous atteignons le parking, situé sur la route des glaciers. On se dit qu’on pourra toujours s’arrêter en chemin à Helen Lake et voir si on décide de continuer. Je me connais… Arrivés à Helen Lake, j’en profite pour avaler un sandwich, admirant la montée qui nous attend. Le circle peak se présente droit devant nous, orangé. Le sommet parait friable et je sens que la montée ne va pas être de tout repos. Je n’ai pas de jus aujourd’hui. Pourtant on finit par atteindre ses 2993 m et les couleurs me ramènent au cœur de Gavarnie. Lacs bleus, terre presque ocre… les dégradés s’accumulent sur cette vue à 360°. J’appréhende la descente qui se déroule, finalement, tout en douceur. Arrivés au parking, il nous reste encore une heure avant la nuit.


À la fin de l’été, j’avais encore quelques randonnées inscrites à ma liste. La météo, les feux de forêt de Jasper, le manque d’équipement resté en France m’ont limité dans ma découverte de ces montagnes imposantes. J’ai fini par doucement en tomber amoureuse et jespère y retourner, ne serait-ce que pour les vacances.
Et vous, une envie d’aventures dans Rocheuses, en Alberta ?

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