Lors de ma traversée des Pyrénées via le GR10, j’étais passé par le col de Madamète sans en gravir le pic. Alors lorsque l’opportunité se présenta, je reprenais le chemin que j’avais pris un an plus tôt, en sens inverse pour aller gravir le Pic de Madamète. Une aventure d’une journée aux paysages splendides.
Garés au parking de la station de ski de Tournaboup, nous regardons le ciel perplexe. Il fait froid, le brouillard est là et la bruine a pris place. Est-ce que les prévisions météos étaient incorrectes ? Je regarde à nouveau, ils ont bien prévu du soleil. Je me dis qu’on passera peut-être au-dessus des nuages lorsque nous commençons à marcher frigorifiés. Une amie vient de me proposer de partir en festival de salsa, ai-je vraiment envie d’emprunter à nouveau le GR10 ?
Je ferme mes pensées et fais connaissance avec les autres randonneurs qui m’accompagnent. Je me souviens très bien du chemin. Nous ne voyons pas grand chose à travers les nuages, mais les balises blanches et rouges ont un doux goût familier. Nous longeons le ruisseau dets Coubous, puis celui d’Aygues-Cluses. De cette partie du GR10, j’en garde un incroyable souvenir. Celui d’une adulte qui regarde avec ses yeux d’enfants, les bosquets, les herbes vertes claires contrastant avec le ruisseau étincelant sous le soleil, imaginant une fée sortir à chaque instant. Aujourd’hui cependant, la vue est bouchée. On devine légèrement la féérie d’antan, tandis que le soleil essaie d’émerger.
La conversation fuse tandis que nous atteignons le nouveau refuge d’Aygues-Cluses. Je l’avais aperçu en construction l’été passé et je ne savais pas trop quoi penser de ce projet. Le refuge permet de faire plus facilement le tour du Néouvielle, évitant peut-être les bivouaqueurs intempestifs, ceux qui ne respectent rien. Et en même temps, cet endroit semblait encore sauvage lorsque je l’avais traversé, profitant de la petite cabane adjacente en comité réduit et sympathique. Heureusement la cabane est encore là, et je suis ravie de retrouver celle qui a marqué mon GR10.
Il est 11h et j’aperçois en contre-bas des campeurs qui font leur toilette, tente encore montée. Je râle… mais je sais pas quelle est la règlementation exacte de ce côté. Mes compagnons de marche me mettent le doute. En tout cas il m’est impossible de prendre le lac en photo sans des mecs à moitié à poil devant… et ça, ça me fout en rogne.
Je décide de garder des forces pour le sommet. La pente se raidit légèrement et nous avançons sur le chemin bien tracé. Je retrouve les doux lacs de Madamète vers lesquels j’avais opté pour une pause déjeuner sous les orages menaçant l’été dernier, puis le laquet, avant de m’engager sur le pierrier nous menant au col. Il y a du monde cheveux au vent. Alors que les autres randonneurs prennent une barre, j’avance pour ne pas prendre froid vers le sommet.
Le sentier est bien visible et nous ne sommes pas les seuls à l’emprunter. Une première grimpette vers la droite, puis on bifurque légèrement vers la gauche pour s’engager sur de courts lacets. Le terrain est usé et glissant, et les gens qui descendent semblent hésiter un instant. Une fois passés, je prends de l’élan pour ne pas me retrouver à piétiner dans le sable et le sommet est finalement là, après une courte grimpette.
La vue à 360° est splendide. Je reconnais le lac d’Aumar et celui d’Aubert, où j’avais dormi sur l’aire de bivouac pour monter le Néouvielle. Puis mon esprit vogue avec nostalgie, dans les souvenirs de randonnées presque lointaines, à l’image du Turon de Néouvielle en hivernal et le refuge de Packe. J’entends alors quelqu’un parler du Vignemale, et cette coupure s’offre comme la promesse d’une ascension prochaine.
On restera deux heures au sommet, le temps qu’une fille qui avait raté le départ nous rejoigne et finisse la journée avec nous.
Pour mon plus grand bonheur, nous faisons une boucle. Nous redescendons jusqu’au col de Madamète avec la plus grande des attentions, puis nous bifurquons à gauche sur le sentier menant jusqu’au lac de Tracens. Les nuages qui nous avaient quitté à Aygues-Cluses recommencent à jouer avec le paysage.
Nous poussons jusqu’au lac de la Jonquère jusqu’à rejoindre celui dets Coubous dans le brouillard total. L’humidité ambiante rafraichit nos corps gorgés de soleil tandis que nous traversons le barrage, devinant au loin la silhouette de randonneurs inconnus. A partir de la cabane, les brebis nous rejoignent et descendent en notre compagnie, bêlant ardument au passage. Enfin nous retrouvons le GR10 matinal, puis la piste pour clore cette journée, finalement ensoleillée, autour d’un verre bien mérité.