Voyage et karma

Voyager donne du fil à retordre à ma sensibilité.

Depuis que j’ai quitté mon pays, j’ai ouvert les yeux sur le monde. Sur les paysages magnifiques qui nous entourent certes, mais surtout sur l’humain.

J’y ai redécouvert le couchsurfing, y ai testé le woofing, levé mon pouce quelques fois et ai pris dans la gueule à chaque fois, ce que l’homme sait faire de plus beau. Aide, générosité… ces mots n’apparaissent pas forcément dans nos fils d’actualité ou sur notre écran de télévision. Et pourtant il suffit de regarder autour de soi, pour se rendre compte que l’humain est grand.

Je ne saurais pas l’expliquer… mais peut-être que le fait de se mettre à nu, en expliquant que l’on a besoin d’un toit, que l’on souhaite un échange ou se rendre dans la ville d’à côté, aide notre prochain à user de sa générosité.

La semaine dernière par exemple, j’ai été malade, mon plan HelpX est tombé à l’eau et mon téléphone m’a lâché. Pas d’énergie pour trouver un plan B, R. rencontré quelques jours plus tôt s’est plié en quatre pour me trouver un toit le temps que je récupère et m’a même laissé son vieux Smartphone. S. qui m’avait pris en stop de Macksville à Byron Bay, refusant ma participation aux frais d’essence, m’a laissé les clés de son appart alors qu’elle partait le lendemain à l’étranger.

De la chance, du karma, des opportunités ? Je ne sais pas. Mais je suis plus que touchée de la confiance que m’accordent les gens. Je suis tout le temps surprise… et j’ai toujours autant de mal à recevoir. Parfois c’est trop. Pourquoi moi ? Pourquoi les gens sont aussi gentils avec moi ? Qu’est-ce que cela leur apporte ? Comment les remercier ? Je me retrouve souvent face à un mur, me demandant qu’est-ce que je pourrais faire, dire, offrir pour leur montrer toute ma gratitude.

Avec couchsurfing, j’ai appris à être un peu plus relax… en me disant que si cette personne m’aide et m’héberge, je pourrais faire la même chose le jour où j’aurais un endroit confortable pour accueillir des étrangers. « Si tu aides ton prochain, quelqu’un te le rendra ». J’imagine que ça marche comme ça.

Parfois je me pose et demande à la personne… Pourquoi ? Pourquoi tout ça ? Et on me répond: parce que tu as trouvé la force de partir, de faire ce dont tu avais envie, forçant le destin vers une vie plus libre. Tu es une source d’inspiration pour moi et je suis ravi(e) de pouvoir t’aider dans ce sens. Whaouw.

Alors quand je demande aux personnes que je rencontre comment était leur séjour en France, les avis sont mitigés. Ceux qui font un effort pour parler français reviennent avec une expérience plutôt positive. Les autres un peu moins. J’imagine donc qu’à partir du moment où l’on s’ouvre à l’autre, l’homme est prêt à faire son possible. Je me souviens de ce couple perdu dans le métro parisien, que j’avais aidé il y a quelques années. Leurs sourires avaient suffi à égayer ma journée.

Alors s’il vous plait… Ouvrez les yeux, arrêtez-vous une minute et aidez ce jeune homme un peu perdu, échangez quelques secondes, allez prendre un café avec cet étranger qui vient de vous aborder, et vous n’en serez que récompensé.
J’en profite pour remercier tous ces inconnus que j’ai rencontré, qui m’ont forcé à croire en l’humain sur mon chemin. La vie est bien plus belle avec un sourire sur son visage et un brin d’humanité.

Et vous qu’en pensez-vous ? Quand vous êtes en voyage ou recevez l’aide de quelqu’un, que faites-vous pour les remercier ? Avez-vous aussi des difficultés à recevoir sans donner ?

Gosford, l’artiste

Le charango de Léo et ma flûte s’entrelacent paisiblement, envoutant la foule endormie. Les flammes dansent et nous accompagnent, bercées par la musique et les ondes positives.

Dans quelques heures je partirais, laissant le Rhythm Hut derrière moi. Une semaine riche en émotion et personnalités de tout genre. Un woofing pas comme les autres, un endroit qui appelle à la créativité sans extravagance. Un lieu, où la musique se joue, se vit. Une maison où l’on perd ses repères, dans un joyau bordel de cacophonie.

La ville en elle-même ne laisse entrevoir ses charmes. Mais il suffit de pousser une porte ou deux, pour déambuler le temps d’un après-midi, dans un entrepôt désaffecté et laisser libre court à son imagination, pour poser sur le papier sa vision photographique.

Sydney, poétique

Sydney, par une journée ensoleillée.

Je me laisse charmer
par le sourire de ses habitants
qui leur donne un air charmant.

Le retour à la ville
n’est pas si facile
mais ce tour dans le quartier des Rocks,
lui donne un air de petit village
qui n’a pas toujours été si sage.

Le Rock Discovering Museum m’a chuchoté au creux de l’oreille,
qu’il y a quelques années en arrière,
c’était le site des premiers colons,
des marins et truands un peu trop tournés vers la boisson.
Déclin et maladies s’en suivent,
jusqu’à la construction de l’Harbour Bridge.

Sydney s’étend, Sydney de diversifie
et ce n’est quand 1970
que les Rocks sont finalement reconnus d’importance culturelle.
Après cette balade riche en émotions,
je décide de continuer de plus belle
en direction de Milsons Point où Luna Park se dessine bien triste
sans sa horde de touriste.
Luna Park Sydney
Heureusement que la vue sur l’Opéra,
me sauve à point nommé de mon embarras
jusqu’à ce que je décide de retraverser le pont,
à contre courant.
Clien d'oeil sur l'Opéra
De Circular Quay au Botanic Garden,
je remonte péniblement chez mon hôte,
les jambes en feu mais la tête haute,
ornée d’une explosion de tâche de rousseur.
Oh soleil, tu as fait mon bonheur.

 

La solitude en voyage

Déjà un an et demi que je suis sur la route.
C’est une expérience extraordinaire, qui me permet d’évoluer au fil du voyage et des rencontres.

J’ai beau voyager seule, je ne le suis jamais ! Après 5 mois de voyage en Nouvelle-Zélande, je ne rêvais que d’une chose: m’enfermer dans une pièce, le temps d’une soirée, histoire de pouvoir me retrouver seule avec moi même.
Depuis j’ai changé. J’ai appris à me créer une bulle, même avec des gens autour. Appris à prendre du temps pour moi, même si mon voyage s’agrémente de HelpX, couchsurfing et autres magnifiques moyens d’aller à l’encontre de l’autre et de sa culture.
Mais aujourd’hui faut que je vous le dise… tout n’est pas beau et rose en voyage. Il y a les coups de blues, les remises en question, les incertitudes, les déceptions. Tout comme dans la “vraie” vie quoi ! Et quand on voyage seule, la solitude nous pèse encore plus parfois.


À mon arrivée en Australie il y a de cela 3 mois, j’avais un plan: trouver du boulot pour une longue période, histoire de me poser et de reprendre des forces. Mais vous le savez peut-être déjà, les plans sont faits pour être changé. Il y a quelques semaines en arrière, j’ai décroché un job dans une station de ski (oui vous avez bien lu, il neige aussi en Australie !). C’était parfait ! Un boulot pour la saison, un très bon moyen de rencontrer plein de gens et l’occasion parfaite pour apprendre à skier. Mais voilà, le jour de mon départ en train, j’ai fini par m’écouter et tout annuler.

«Le voyage est riche en enseignement. J’ai appris à m’écouter, à suivre mes intuitions et mes émotions. Le voyage m’a aussi montré que j’étais seul maître de mes décisions. »

Je n’avais pas de plan B, les finances en vrac et personne pour me conseiller.
Je me suis sentie seule, très seule.
Moi qui vait souvent de l’avant, j’ai pris du recul, physiquement et moralement.
Je suis allée me réfugier chez mon ancien hôte HelpX, pensant que son environnement confortable et sécurisant me remettrait en phase avec moi-même.

J’ai passé un bon mois à tout remettre en question.
Le pourquoi j’étais là. Pourquoi je n’étais pas en France à développer ma carrière professionnelle. Pourquoi à bientôt 30 ans, je n’étais pas posée avec un mec et un gosse. La situation personnelle de mon hôte me mettait en face des yeux ce que je ne voulais pas voir et les questions incessantes que je voulais éviter résonnaient à haute voix: “Qu’est-ce que tu vas faire de ta vie ?” “Quand vas-tu rentrer au pays ? Si tu rentres, penses-tu encore bosser dans le tourisme ?” “Ton amie de maternelle a un gosse de 2 ans et demi, t’attends quoi ?”.

J’avais beau ne pas être seule “physiquement”, la solitude s’est engouffrée. Mes amis me manquaient, ma famille, mon pays… Je me suis rêvée en France, dans ma maison de campagne, dans ma chambre. Je me suis demandée s’il n’était pas temps de rentrer, de retrouver une routine, un schéma réconfortant, un peu de calme.
J’ai voulu troqué l’excitation de ma vie actuelle, pour une vie plus zen sans prise de tête. Car voyager c’est pour moi: ne pas savoir où je vais dormir le soir, comment je vais m’organiser pour les repas, est-ce que mes finances vont suivre, trouver du boulot dans un lieu inconnu, ne pas se faire arnaquer, les limites de mon visa à prendre en compte, la concurrence avec les autres backpackers et s’adapter, toujours.

« Derrière le voyage se cache une logistique immense qui te demande d’avoir la tête sur les épaules et de l’énergie en permanence. »

Alors j’ai appelé à l’aide…
C’est bien beau d’être indépendante, de vivre sa vie comme on l’entend, mais parfois on a besoin de ses proches. Et mes proches étaient loin à ce moment là.

Pour certains de mes amis, la distance ne change rien… pour d’autres, on s’efface. C’est dans ces moments là que tu sais sur qui compter ou pas. Alors est-ce que je peux en vouloir à ces personnes de ne plus me demander comment ça va, parce que je suis à l’autre bout du monde ?
Je me suis même demandée si j’avais le droit d’être malheureuse dans un pays où beaucoup de monde rêve d’aller. Je me suis sentie coupable de ne pas être au top de ma forme en Australie. “Mais attends quoi ! T’es en Australie ! T’as trop de « chance » ! Tu te rends pas compte ou quoi ?! C’est quoi ton problème ? Profites-en, au lieu de pleurer dans ton coin.” Bon j’avoue… cette phrase je m’en suis servie moi-même pour aller de l’avant. Puis je me suis aussi rendue compte que non, j’avais tout autant le droit d’avoir des coups de mou que quelqu’un qui avait choisi de vivre une vie plus pépère (parce que oui, la vie est un choix).

« Hors j’ai l’impression qu’en voyage tout est décuplé parce que ce que tu vis est éphémère: les rencontres, les émotions, la solitude. « 

J’ai envié ces couples qui voyagent à deux, leur permettant de se reposer l’un sur l’autre à tour de rôle. Puis je me suis dit que la solitude pouvait frapper tout le monde.

« Moi, je me la suis prise dans la gueule. Sèche, ingrate et associable. J’avais beau être entourée physiquement, je me suis sentie très seule moralement.  »

Alors j’ai repris la route, je suis allée de l’avant, comme je l’ai toujours fait. Vous pouvez appeler ça de la fuite, mais l’avantage en voyage c’est que le mouvement est plus facile. La solitude semble, par contre, plus intense.

« La solitude ça a du bon aussi. Elle nous porte sur un plateau les remises en question, qui nous permettent d’avancer… dans le voyage, dans notre bien-être, dans notre vie de tous les jours.  »

Comme dirait Maxime de Détour Local, dans son magnifique article qui éclaire mes maux: “C’est peut-être ça le repos idéal. Prendre le temps de se questionner sur un rien et voir comment on en ressort à l’autre bout. Décrocher ou s’accrocher. Partir ou revenir. S’arrêter ou continuer. Mais sans jamais oublier d’avancer.”

La solitude donc… ou l’art d’évoluer doucement.