Le Cabaliros, c’est un sommet mythique du Val d’Azun. Dès que j’ai posé les pieds dans le coin, cet objectif de randonnée est revenu plusieurs fois à mes oreilles. Alors quand à travers une conversation, on m’a proposé d’y dormir au sommet, la graine fut plantée et je n’ai pas pu résister à l’envie de ressortir l’idée.
On grimpe la piste qui part de Sireix. Les panneaux indiquent le Cabaliros. Une fois garé vers 1486 m, on bifurque à droite et non à gauche sur le GR habituel qui passe par la Tucoy. En effet, la neige est présente en ce début de printemps et il n’est pas recommandé de s’engager sur le parcours estival pour cause de dévers important. Après quelques mètres sans neige, engagés vers la cabane de Banciole, on finit rapidement par chausser les raquettes. Le Cabaliros n’est pas encore en vue, mais la grimpette s’annonce blanche, à mon plus grand bonheur.
Voilà quelques semaines déjà que je n’avais pas chaussé les raquettes. Je pensais que l’hiver avait tiré sa révérence et après quelques semaines chaudes, le froid est revenu pour un dernier clin d’œil. Je n’avais encore jamais bivouaqué en pleine neige et le Cabaliros apparaissait comme un objectif sympathique, surtout avec la vue à 360° qu’il promettait.
Après la cabane de Banciole, nous nous orientons vers le Cap de la Lillade. Je suis mon guide du jour qui est venu maintes fois par ici. On rejoint le ruisseau de Hourques que l’on devine à travers le creux qu’il dessine. Les rochers qui se dégagent de la neige encombrent mes raquettes, mais j’avance doucement sur le devers flagrant. Heureusement ce passage chaotique est de courte durée et on rejoint très vite les flancs plus lisse qui se dégagent jusqu’au Clot de la Bassette. On aperçoit le col de Contente sur la droite avant de prendre à gauche vers notre objectif final.
Le Pic du Cabaliros a joué tout l’après-midi avec les nuages et lorsque nous l’atteignons, la vue n’est pas entièrement dégagée. Je me délecte des noms des sommets qui nous entourent sur la table d’orientation et ouvre l’oeil comme une enfant. Parfois le fond blanc disparait pour laisser place à l’arrière plan, mais on est loin de l’ouverture grandiose à 360°.
La neige parsème goulument le sol sur lequel nous nous trouvons. On commence à creuser pour caler la tente, mais finalement on se dit que le gel matinal risque de bien s’accrocher à la paroi et qu’il sera plus dur de s’en extirper. On recouvre donc les bords de la tente avec de la neige tassée et je me glisse rapidement à l’intérieur pour me changer.
C’est qu’il fait déjà froid. Après être parti vers 14h, l’arrivée vers 18h s’est rafraichie et j’appréhende un peu le reste de la soirée. La vue est maintenant complètement fermée par le brouillard épais qui s’est engouffré dès notre arrivée. Je savais que la météo ne serait pas optimale. Mais après des jours de pluie, je voulais saisir la seule éclaircie de la semaine. J’espérais que le beau temps se mêle à une nuit étoilée. Le nez sorti plusieurs fois à travers l’ouverture de la tente, je profite de quelques fenêtres à travers les nuages épais.
Je ressors plusieurs fois affrontant le froid environnant, espérant que le brouillard se transforme en grand ciel dégagé. Il faut que je me rende à l’évidence, ce ne sera pas pour la soirée.
Emmitouflés dans nos sacs de couchage, on se goinfre d’un cake aux olives, d’une soupe chaude et on fait descendre le tout à coup de whisky ou patcharan. Les souvenirs se laissent embrouillés par le brouillard et les questions qui se sont posées quelques jours en arrière… tranchantes. Les nuages ne suffisent pas à refermer la plaie.
Au petit matin, le brouillard est encore plus épais. Pas de coucher, ni lever de soleil pour se rassurer. Alors je me laisserai guider à l’aveugle par mon guide muni de sa carte et de sa boussole. La confiance est encore là. Nous redescendrons sur les flancs du Cabaliros, droit devant nous. Nous rejoindrons ensuite les fougères et la piste nous ramenant à Sireix.
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