Trek sur le Gr10 lors de la traversée des Pyrénées-Orientales

Ma traversée des Pyrénées-Orientales en autonomie

C’était l’été 2019, je rentrais de Côte d’Ivoire et ce qui me manquait le plus de mon pays, c’était les montagnes. Toulousaine d’origine et connaissant finalement très peu les Pyrénées, j’ai décidé de me prendre les deux mois d’été pour me lancer à l’aventure du Gr10. Un faux départ et une tendinite plus tard, ce ne sera seulement que la traversée des Pyrénées-Orientales… mais quelle aventure !

De Banyuls au col del Terrers

Après mettre fait déposer à Banyuls par un couple de jeunes en van, accro à la plongée, me voilà au départ du Gr10 vers 13h. Il fait beau et un peu trop chaud, cependant la petite brise du maquis et le champs des cigales m’accompagnent tout au long de la redoutable montée jusqu’au Pic de Sailfort.
Les Grdistes, comme on nous appelle, arrivent tous dans l’autre sens mais me renseignent sur le seul point d’eau disponible entre Banyuls et le Col de l’Ouillat.
Je finis par poser ma tente en compagnie des vaches juste avant le Col des Terres car le pic de Sailfort me semblait trop exposé. Première nuit agitée avec le meuglement d’un jeune veau et quelques randonneurs téméraires encore d’attaque à minuit.

Du Col del Terres au Perthus

Réveil avec le soleil et une vue magnifique derrière ma tente. Le manque d’eau me contraint à prendre la route sans petit-déjeuner jusqu’à la cabane de Tanyadera. Heureusement quelques passages en forêt ont adouci l’atmosphère bien trop chaude de cette journée d’été. Je viens d’ailleurs de croiser un naturiste, muni de son sac léger.
Après une courte pause, il est temps de repartir au col de l’Ouillat situé juste après le Pic de Neulos pour reprendre des forces et de l’eau bien fraiche.
Petite baisse de moral après mon sandwich local, peut-être l’effet d’un retour soudain à la civilisation après les belles vues dégagées, ou alors le fait d’être partie en solitaire, rendant l’aventure plus rude.

La descente vers le Perthus est longue et chaude, et le bruit de la circulation lointaine me fait perdre haleine. Beurk ! L’arrivée au Perthus par un parking me donne envie de repartir au plus vite… mais fatiguée. Éreintée, mon étape du jour semblait encore trop longue. C’est alors que je me retrouve au fort de Bellegarde par inadvertance et quelques minutes trop tard pour la dernière visite. 1h plus tard, un brin désespérée, je demande à la guide qui vient de finir son travail, si elle connait un coin où dormir. Finalement ce sera au cœur du fort même, que je passerais la nuit.

Du Fort de Bellegarde à Las Illas

Réveil tôt mais difficile… un peu de mal à sortir de ma tente avec le bruit du vent. Finalement je remballe et finis par partir vers 8h, prenant un raccourci vers les Ruines de Panissars pour retrouver le GR. Large chemin puis route jusqu’à Las Illas, avec un brin d’ombre et quelques mûres sauvages pour tenir le coup. Las Illas semble si loin et je finis pourtant par arriver sur une aire de camping aménagée dans un petit village plein de charme. Un Tchèque dort paisiblement à l’ombre. La sieste pour moi attendra: pâtes au roquefort, douche, lessive… voilà de quoi m’occuper quelques heures avant de trouver un peu de temps pour soigner mes premières ampoules.
Je crois que le GR10 a des choses à m’apprendre sur ce besoin de toujours vouloir avancer seule et finalement lâcher-prise car il semble bon de vouloir prendre son temps. Cet après-midi sera consacré au repos, car le manque d’eau du premier jour et la montée rude jusqu’au Pic de Sailfort aura eu raison de mon tendon d’Achille.

De Las Illas au Moulin de la Palette

Réveil à 6h en même temps que le lampadaire. Je m’offre un petit-déjeuner histoire de reprendre des forces. Patrick, l’anglais qui bivouaque au même endroit, m’a dit que les premiers jours étaient les plus dur et qu’il s’était rendu compte qu’il ne mangeait pas assez au début pour bien récupérer.

La montée s’est finalement bien passée malgré ma tendinite. J’ai recroisé le nudiste avec le même sac blanc et lunettes de soleil, tel un mirage au milieu des montagnes. Bizarre…
Petit pique-nique rapide après Roc de France, puis j’entame la descente. De Montalba d’Amélie au gîte, je trouve les quelques kilomètres plutôt long. Il est temps de s’arrêter… tant pis pour Arles-sur-Tech, ça sera pour demain.

Je plante ma tente au Moulin de la Palette, profite du torrent frais pour mes pieds puis d’une douche bien chaude, avant d’engloutir un dégoutant plat lyophilisé que des hommes bien trop chargés auront eu le plaisir de se débarrasser en chemin. Merci à eux 🙂

Du Moulin de la Palette à Batère

Réveil tardif, je finis par sortir de ma tente vers 7h. A ma grande surprise elle est sèche malgré l’orage de cette nuit. J’en profite pour laisser mes affaires et préparer un petit-déjeuner chaud. Au menu: crumble pomme-banane lyophilisé offert la veille. Mais à peine ai-je eu le temps de me poser, la pluie s’est remise à tomber m’obligeant à replier ma tente mouillée.

Départ vers 8h40 alors qu’une grosse journée m’attend. Montée au col de Paracolls, avant de redescendre sur Arles-sur-Tech vers midi. J’en profite pour refaire le plein de fruits et d’encas avant de me renseigner à la pharmacie sur les tendinites. Réponse attendue: du repos.

Je continue tout de même ma route, prenant le temps de pique-niquer sur les hauteurs d’Arles-sur-Tech, ce joli petit village médiéval, et d’envoyer des signes de vie à ma famille. Puis j’entame la plus longue des montées… avec 1168m de dénivelé positif avec déjà 3h de randonnées dans les pattes.
La dernière heure est bien fraiche avec l’altitude et le vent des montagnes. L’atmosphère a changé depuis Banyuls. Une communauté s’est d’ailleurs installée au creux des montagnes, elle me ramène gentiment à Lorrina. L’odeur du feu me remotive, jusqu’à ce que je finisse par me retrouver à marcher sur le goudron.

Au gîte de Batère, il fait chaud et j’ai envie de me glisser dans des draps propres. Je prends cependant l’option bivouac un peu plus loin, à côté des mines. De retour au refuge pour une douche, la vue du plat du soir aura raison de moi ! Je décide d’opter pour l’option moussaka, en compagnie d’une famille venu faire le Tour du Canigou. Un brin de compagnie et une bonne douche plus tard, me voilà réchauffée pour ma nuit en bivouac.

Du refuge de Batère au refuge des Cortalets

Réveil avec le soleil et départ vers 8h. Aujourd’hui, on y va doucement.
Les paysages changent et je commence à trouver quelques cascades. J’atteins la cabane du Pinatell juste avant midi et profite d’une pause au soleil avant que d’autres randonneurs ne viennent. Deux locaux de 70 et 74 ans débarquent avec leurs cèpes fraichement cueillis et du bon vin rouge local. On parle de la Côte-d’Ivoire au milieu des Pyrénées, de randonnées et de tendinite. Deux militaires retraités et beaucoup d’humour à la clé. Ah que je les aime les gens du coin, les gens des montagnes !

Après une longue pause en bonne compagnie, j’attaque la montée douce jusqu’au croisement, puis corsée jusqu’au refuge des Cortalets via l’ancien GR10 (variante). J’y découvre une épave d’avion et une magnifique vue donnant jusqu’à la mer.
J’installe mon bivouac dans un coin sympa à côté du refuge avec une vue sur les montagnes… mais pas de douche chaude cette fois.

Du refuge des Cortalets à celui de Mariailles

C’est le Jour J ! Le jour du Pic du Canigou, hors GR. J’avais dit aux deux bons vieux militaires que je m’arrêterais peut-être après avoir gravi le Pic du Canigou, que je pensais à défaut le plus haut sommet des Pyrénées-Orientales (et non, c’est le Carlit !).

Départ des Cortalets vers 8h et montée via le Pic Joffre. Je finis par arriver au sommet vers 10h30 avec mon gros sac et ma tente. Quelques photos plus tard, j’appréhende la descente de la cheminée pour rejoindre Marailles. A force de demander des renseignements, une néerlandaise marchant sur le GR11 côté espagnol, me propose de m’accompagner sur la descente. Finalement pas d’encombre… ce qu’on me disait vertical et dangereux à descendre, se révèle être la partie la plus facile ! La descente totale jusqu’au prochain refuge s’annonce longue… très longue. Alors je me pause dans l’herbe pour le pique-nique avec une magnifique vue, dorant au soleil et à deux doigts de m’endormir.

Je finis par arriver au refuge avec Chriss et ses deux enfants, qui font la traversée des PO (Pyrénées-Orientales) en une semaine. Un vieux papi me disait que mon sac était mal réglé, alors Chriss en a profité pour papoter et j’ai fini par passer la soirée avec eux. J’ai dormi au refuge gratuit adjacent, en compagnie d’un vieux espagnol qui a pour projet de grimper tous les pics alentours, et qui à passer la nuit à me réveiller à coup de « joder ! joder ! ». Finalement dormir en tente se révèle être un luxe.

Du refuge des Marailles au Ras de la Carança

Se devait être un jour « sans » pour moi, mais Chriss et les enfants m’ont motivé pour atteindre le refuge du Ras de la Carança dans la soirée, pour pouvoir profiter des gorges du même nom, hors GR, le lendemain. Réveil courbaturé et en speed, car la cabane se révèle plus sombre que la tente, et mon réveil habituel avec le soleil s’en est retrouvé perturbé. Je suis en retard… nous devions partir à 7h et mon sac n’est pas fini. Chriss et sa petite famille m’attendent un peu puis finissent par partir.
Je ne les reverrai jamais… ni à Py, ni à Mantet, ni au refuge que je finis par atteindre paisiblement.

De Marailles à Py, je suis un GR de pays qui permet d’éviter le Col de Jou et espérer retrouver la joyeuse troupe. Un brin de ravitaillement à Py où se déroule la brocante du 15 août, j’opte pour un brin de stop jusqu’au col de Mantet (ce qui me fait gagner 2h et m’évite de marcher sur le goudron) dans l’espoir de rattraper les autres.
A Mantet, je croise un randonneur qui débute à peine et me donne des conseils pour ma tendinite et me dit d’éviter le saucisson. Il me propose de m’accompagner mais ne voulant pas le retarder avec ma petite cadence, je le laisse prendre de l’avance. J’en oublie de prendre en photo la petite place toute mignonne de Mantet dans la précipitation.
Dans ma montée vers le Col de Pal, je croise un couple du coin qui m’affirment que le meilleur de la Carança est encore plus haut au niveau des lacs… et bien, je verrais au matin ce que je décide de faire.

Arrivée tardive vers 19h, coincée par un troupeau de vache en plein milieu du chemin… c’est aussi ça les joies du GR10 ! Je n’ai pas le temps de sympathiser et recueillir quelques renseignements, car à peine ai-je fini de manger que tout le monde dort déjà. Je passerai la nuit à côté d’un torrent.

Jour de repos au Ras de la Carança

Il ne reste que deux ou trois tentes lorsque je me lève. Je discute avec les voisins, qui vont aussi passer une autre nuit au Ras de la Carança. Je pars me renseigner au refuge pour savoir combien de temps prend la descente des gorges. L’option de monter aux lacs me tente, mais je décide de ne rien faire de la journée. Je la passerai à lire auprès du torrent.

Le soir, l’arrivée des nouveaux campeurs me sort de ma solitude mais la fatigue finira par m’emporter vers 20h.

Du Ras de la Carança, à Thues-les-Bains jusqu’aux Bouillouses

Les courbatures sont parties mais le départ avec la tendinite au repos tire… La descente des gorges est sympa mais finit par s’étirer en longueur. Arrivée au petit kiosque, le gardien me dit que le petit train jaune se prend un peu plus haut, départ 14h30. J’ai deux heures devant moi pour prendre un sandwich.

Le Petit Train Jaune (6€) me dépose à Bolquère où je récupère le GR10. C’est l’occasion de faire le plein de produits locaux et d’eau avant d’entamer la montée à travers les pins sur de larges pistes peu intéressantes. Sortie de là, les Bouillouses semblent encore loin. Le GR10 ne passe pas par l’étang de la Pradelle et je suis obligée de suivre la déviation menant à l’Etang Nègre. Le coin me rappelle le Canada et les bords du lac sont idéals pour bivouaquer. Malheureusement l’eau potable me manque et je suis obligée de pousser jusqu’au lac des Bouillouses.

Il fait déjà presque nuit lorsque j’arrive au barrage. Les couleurs sont belles au loin. Les gens campent agglutinés à côté de leur voiture. Après avoir rempli mes 3L d’eau, je continue au bord du lac dans l’espoir d’atteindre le bout et camper vers le ruisseau. Trop tard… je poserai ma tente près du GR10 sur une zone plate, avalerai ma soupe et la saucisse/fromage du jour pour enfin me coucher vers 22h30.

Des Bouillouses aux Bésines

Levé tardif (8h), pliage de tente rapide avant de prendre un petit-déjeuner avec vue sur le lac. Mais c’était sans compter les chevaux sauvages qui ont décidé de débarquer et de venir renifler la moindre de mes affaires, emportés par leur curiosité. Mon quignon de pain à la main, j’ai du jouer les contorsionnistes pour récupérer mes biens, priant pour que la femelle devant moi et son poulain évitent d’écraser mes bâtons de marche posés sur le rondin de bois.

Je pars un peu plus loin emportant tout à la main, recouverte de bave de cheval. Quelques couples de randonneurs se réveillent après la limite imposée par le camping sauvage du parc. C’est vrai que la vue est belle avec le soleil scintillant sur le lac, dont j’avais un souvenir moins artificiel de mon enfance…
Je commence ma rando vers le 1er pic du jour: la Portella de la Grava. Les paysages sont splendides.

La montée est longue et je m’octroie une pause vers la cabane de Rouzet. Le second col (Coma d’Anyell) s’annonce compliqué après le repas. Mes forces m’arrêtent au refuge des Bésines après une longue descente dans des paysages spectaculaires. Une douche chaude, un brin d’écriture et ce sera déjà l’heure de me réfugier sous ma tente, pour une nuit d’orage.

Du refuge des Bésines à Merens-les-Vals

J’aurais pu continuer encore un peu… mais une tendinite au talon d’Achille ne doit jamais se prendre à la légère. J’ai d’ailleurs forcé et poussé, et la fin aurait pu être désastreuse. Fort heureusement l’eau ne manquait plus dès le 2ème jour et j’ai appris à me pauser lorsqu’il était nécessaire. Aujourd’hui sera donc le dernier jour de cette belle aventure. Il m’aura fallu un peu de temps pour déconnecter, mais passer le cap, la routine s’installe et la montagne se dévoile.

Du refuge des Bésines, je descends doucement jusqu’à Mérens-les-Vals. Un dernier col dans le brouillard et c’est une pluie finie qui m’accompagnera jusqu’au bout, me laissant entrevoir les fleurs sauvages de la vallée. C’est magnifique mais je suis fatiguée.

Juste avant Mérens-les-Vals, je croise un groupe de promeneurs venus profiter des bains d’eau chaude naturelle. Trop de monde, je me dirigerais vers le village vide et la gare… vide elle aussi. Les trains ne s’arrêtent plus à Mérens-les-Vals.

Les chaussures pleines de boues et la dégaine transpirante, j’opte pour du stop jusqu’à Ax-les-Thermes. Pas le choix. Une femme et deux de ces enfants me prendront au passage, et je raterais le train de quelques minutes… Quelques heures plus tard et un RER, je prendrais un bus pour rentrer chez ma mère à Toulouse. C’est la fin d’une aventure, celle de la traversée des Pyrénées-Orientales… mais quelle aventure !

Quelques ressources: www.gr10.fr

Histoire d’un rapatriement

A défaut de pouvoir approcher une personne à 1m, à défaut de pouvoir raconter mon histoire dans la dernière étape qui me rapprochera du lieu nommé « home », c’est à vous que je vais l’écrire.

Je suis partie en janvier dernier, après quelques mois de confinement volontaire à chercher un sens à ma vie dans une nouvelle période sans emploi difficile. Je suis partie faire un bout de chemin sur le continent africain, là où j’avais laissé mon âme la dernière fois… à travailler en Côte d’Ivoire. Je suis partie en janvier et devais revenir pour le mariage d’une amie. Mon itinéraire devait me permettre de retrouver l’inspiration, de décider ou non si j’allais investir sur ce continent prometteur et de rebooster le moral que j’avais perdu depuis mon retour en France, isolée par ma période d’inactivité professionnelle.

De la Namibie, à l’Angola, j’ai suivi les informations à distance, m’éloignant des réseaux sociaux, ayant une nouvelle énergie à partager avec les personnes rencontrées. A entendre parler du coronavirus, c’est sur France Diplomatie que j’allais régulièrement pour vérifier les éventuelles restrictions. Rien n’était à signaler en Afrique, le continent à l’époque sauvé du Covid-19.

Pendant ma dernière semaine à Luanda, les choses se sont précisées dans le nord du continent et mes dernières destinations semblaient commencer à restreindre leurs frontières. J’avais pris un billet d’avion pour Sao Tomé avant même de rentrer sur le territoire Angolais, mon visa me l’obligeant. Après Sao Tomé, je devais rejoindre l’Afrique de l’Ouest pour remonter du Bénin, au Togo jusqu’en Côte d’Ivoire ma destination finale. Mais le Bénin conseillait à leurs ressortissants français de repousser leurs voyages. Je me suis alors dis que je rejoindrais directement la Côte d’Ivoire et qu’au pire des cas, je pourrais me confiner chez l’amie d’une amie à Abidjan.

Sauf qu’à peine arrivée à Sao Tomé, les choses sont allées très vite. Mr Macron a prononcé son discours, et tous mes amis et proches se sont empressés de me dire ce que je devais faire : rentrer au plus vite. Mais il était déjà trop tard. Ils n’ont réussi qu’à me créer une atmosphère anxiogène au possible, que je n’avais pas eu jusque là sur le continent africain. A coup de message toutes les heures, à coup de question pour savoir ce qu’il se passait et ce que j’avais décidé, ils m’ont aidé à stresser au maximum et n’ont pas réussi à me faire prendre du recul sur la situation.

Dès le discours prononcé, j’ai pris contact avec la consule honoraire de Sao Tomé, afin d’avoir enfin des réponses aux questions que j’avais posé à d’autres ambassades de France bien avant ce discours et qui sont restées sans réponse.
La consule m’a conseillé de prendre le prochain vol avec la compagnie Stpairways, qui était complet puis le dernier vol daté du 28 mars. J’ai cherché à changer mon vol du 26 mars pour Abidjan, pour un retour immédiat en France, mais les compagnies et services en ligne semblaient débordés par la situation. Mon vol du 26 a finalement été annulé. Puis celui du 28.

Bien sur, je suis tombée malade. Le stress n’a jamais fait du bien au corps humain. Alors j’ai voulu écrire sur les réseaux sociaux, mais les gens se sont énervés contre moi car je n’avais cas prendre mes responsabilités. Au moment où j’avais besoin de soutien, on m’enfonçait. Heureusement que les proches étaient là, mais même à distance leurs stress semblaient s’emparer de moi.

Lundi, la consule qui a crée un groupe whatssap avec tous les touristes français de l’île, nous dit qu’un vol TAP devrait être mis en place le lendemain pour nous rapatrier vers Lisbonne. « Passez tous à la TAP aujourd’hui ». Ah ça j’ai visité le bureau Sao Toméen tous les jours, afin d’être sûre d’être sur la liste : « oui vous l’êtes bien mais l’avion est décalé au 25 ou 26 ». Le jour du paiement, la directrice de la TAP me dit que je ne suis pas sur la liste alors que je viens de parler à des locaux (jamais vu avant au bureau de la TAP) venant d’acheter leur billet. « Comment ça je ne suis pas sur la liste ? J’ai suivi toutes vos instructions et suis venue tous les jours pour vérifier si j’étais bien sur la liste ! Et maintenant vous me dites que non ? L’avion part demain, que dois-je faire ? » La directrice me dit de me réinscrire et de repasser au bureau le lendemain.

Jeudi 26 mars. Je me lève tôt dans un état lamentable. Je file au bureau de la TAP sous un soleil ardent et attend l’arrivée de la directrice, qui finit par me dire « vous n’êtes pas sur la liste, je n’ai pas de place pour vous, l’avion est complet ». 5 min avant des personnes que je n’avais jamais croisées venaient d’acheter leurs billets. On me dira plus tard que c’était des « fils de ».
J’appelle la consule qui me dit que ce n’est pas normal, que j’étais l’une des premières sur la liste. « Passez chez moi ».

Chez la consule, on parle un peu de la situation puis elle me dit qu’elle va à l’aéroport dans 30 min et que je dois venir avec elle. Je repars chez mon hôte en stress pour faire mes valises et je file à l’aéroport avec elle. Sur le chemin elle continue à passer des coups de fils… à l’arrivée elle me dit : « c’est bon, on a un billet pour toi, pars vite à la TAP pour payer ». Arrivée à la TAP, la directrice me dit que Dieu est avec moi, car elle vient d’avoir deux annulations. Je pense bien fort : « c’est ça oui ». Je paye mon billet au prix fort, 4 fois le prix habituel pour un aller simple en enfer. Le chauffeur me ramène à l’aéroport où les gens ont l’air content de pouvoir rentrer. Moi je me démène avec ma connexion Internet pourri et une copine sur whatssap pour me trouver un billet d’avion décent pour pouvoir rentrer chez moi. Deux jours avant les billets Air France étaient encore à 200 euros, le jour même il ne reste que des places business… après le check-in, je cours me connecter pour pouvoir réserver. Les billets s’envolent et je dois embarquer.

Les journalistes sont là à filmer notre montée dans l’avion. Je m’assois puis réalise que je n’ai pas eu le temps de dire au revoir, même si le guide qui m’a soutenu pendant cette épreuve, est venu me voir à l’aéroport en larme.
Le vol se passe sans encombre, avec deux micro-sandwichs au fromage et un verre d’eau. Je souris. Je crois que ça y est, tout commence à me passer au dessus. La goutte d’eau de la libération. Je ne peux plus faire de retour en arrière, alors autant laisser couler.

Arrivée au Portugal, je reçois le message de mon amie qui a réservé un vol pour moi. Je me rapproche d’un couple de français et d’un autre voyageur. Un peu de compagnie pour passer la nuit par terre, ne fera pas de mal. On discute, on décompresse et je m’octroie un pastel de nata. Ma première fois à Lisbonne se passera dans un aéroport frigorifique.
Après notre courte nuit, on montera dans l’avion nous menant à Paris, moi en business class, eux en économique. Un sandwich plus tard, alors que mon voisin de dernière qui n’arrête pas de raconter de la merde aura un vrai repas, je ressors de l’avion. Le commandant de bord me souhaite bon courage pour la suite de mon voyage jusqu’à Toulouse… les larmes montent.

Il est temps de traverser Paris en RER pour aller jusqu’à l’aéroport de Orly. Je prends mon billet comme une bonne citoyenne et réalise que les transports sont gratuits. Au point où j’en suis… mon RSA est déjà passé 4x à la caisse.

Arrivée à Orly, l’Orlyval ne va pas jusqu’aux hôtels. Je traverse donc l’aéroport à pied avec mon sac et mon système immunitaire au plus bas. Je trouve une place, m’installe dans ma chambre, prend une douche puis reçoit un email : « votre vol Air France Paris-Toulouse vient d’être annulé. Nous vous avons trouvé un vol dimanche ». Elle est où la caméra cachée ?! J’appelle Air France, qui me dit que si je ne me présente pas, je serais automatiquement remboursée. Vraiment ?! J’ai des doutes… cela expliquerait pourquoi j’ai du payer un billet au prix fort alors que la moitié des places économiques sur le vol Lisbonne-Paris étaient vides ! Je m’achète un ticket SNCF, en espérant que lui sera maintenu le lendemain. Mon guide m’appelle et je m’endors sans manger.

Aujourd’hui j’ai retraversé Paris, j’ai pris un bus et me trouve à la gare Montparnasse. Frigorifiée, j’attends gentiment que mon train soit mis en place en espérant qu’il soit bien là. Je suis censée arriver chez moi ce soir, avec la peur au ventre de contaminer mon père du Coronavirus.
Lisbonne, Paris, Toulouse… j’ai traversé tous les plus gros nids à infection (aéroports, métro, bus et gare) alors que la Namibie, l’Angola n’ont que quelques cas déclarés à ce jour.

Alors comme une gentille fille, j’ai suivi tous les conseils des autorités. Mais aujourd’hui, je me demande vraiment si j’ai bien fait. Après avoir été l’actrice principale d’un James Bond, je me demande si je me pardonnerais la dernière étape : avoir pris le risque de contaminer tous mes proches, alors que j’aurais pu resté confiner à Sao Tomé le temps que ça se tasse.

Personne n’a de certitude sur l’avenir alors mieux vaut être chez soi, en sécurité, c’est sûr. Mais la question ne mérite-t-elle pas de se poser ?
Je ne remercierais jamais assez la consule de Sao Tomé, qui de part son travail bénévole et volontaire, nous aura permis de rentrer en France. J’espère que le gouvernement français ne l’oubliera pas.

Aujourd’hui, j’ai peur pour l’Afrique et pour les plus pauvres qui ne pourront rester confiner chez eux. Je rentre encore plus diminuée moralement que lorsque j’étais partie en début d’année. Mais je sais que j’ai de la chance: encore beaucoup de français se retrouvent coincés à l’étranger et les autres nationalités n’ont pas forcément les mêmes moyens que nous.
Alors à tous ceux qui ont du mal avec le confinement, je vous dirais que c’est le bon moment pour vous regarder en face. Lisez les Pensées de Pascal, à la page roi et divertissement.

Cordialement.

Photo de varanasi de nuit le long du Gange

De Varanasi à Agra, voyage en Inde dans la vallée du Gange

Les douceurs de Varanasi, au bord du Gange

Lors de mon premier voyage en Inde, j’avais entendu tellement de choses sur New Delhi, pas forcément positives. Ayant encore de l’appréhension avant de partir une seconde fois, je décidais de rejoindre Varanasi, tout de suite après mon arrivée dans la capitale. C’était sans compter le retard de mon premier vol, qui m’a forcé à courir d’un terminal à l’autre, quémandant le bon prix et l’information correspondante. Fatiguée, c’est dans mon auberge de jeunesse, du côté de Assi Ghât, à quelques pas du Gange, que je récupérerais de mon décalage horaire.

A Varanasi, je n’avais pas de programme en tête, juste l’envie de commencer doucement ce voyage en Inde, de prendre le temps d’atterrir et de me laisser bercer par le rythme spirituel de la ville. J’en ai profité pour rencontrer un couchsurfeur, qui m’a offert une séance de yoga et méditation, et une compréhension plus complète de l’hindouisme à travers la visite du temple au cœur du campus universitaire. Nous nous sommes revus plusieurs fois sur mes quelques jours à Varanasi, afin de partager un repas, d’échanger sur nos cultures respectives ou d’admirer les Ghâts haut perchés dans un spot tranquille.

A la tombée de la nuit le long du Gange

Je me suis promenée le long du Gange, seule, à la tombée de la nuit, de Assi Ghât à Manikarnika Ghât. Ce dernier est le lieu principal des crémations. Lors de ma balade je me suis fait abordée par un étudiant, qui voulait me mener à un ami à lui, afin qu’il m’explique le déroulement des crémations et l’importance de ce lieu pour les hindous. Toujours sur mes gardes, je refusais gentiment les quelques explications nécessitant un « don » et m’éloignait pour m’asseoir sur les marches, non loin d’un couple de touristes, et regarder les feux bruler sur la rive. L’atmosphère est lourde, avec ces deux gros feux que les hommes alimentent. Le premier feu à avoir été allumé ici, n’aurait jamais été éteint.
Le donneur d’explication finit par venir me parler, sans contre-partie, m’expliquant gentiment que les femmes n’étaient pas forcément les bienvenues ici. En effet, bien « trop émotives » d’après lui, elles pouvaient déranger la cérémonie… à une époque plus lointaine, les femmes se jetaient vivantes sur le corps en flamme de leurs maris.

A noter: les photos sont strictement interdites à Manikarnika Ghât

J’ai alors fais demi-tour pour revenir au Dasashwamedh Ghât, bondé de monde, où l’ensemble des touristes et des locaux, se retrouvent pour le Puja du soir. Quand je parle de touristes, il faut savoir que 80% sont Indiens. Varanasi est une destination spirituelle très prisée pour les hindous. L’ambiance y est particulière, entrainée par l’attention de la foule, les chants sacrés et les rituels exécutés par les prêtres.

Au lever du jour

Juste avant le lever du jour, je me dirige vers Assi Ghât à quelques pas de mon auberge. C’est là qu’a lieu la cérémonie du lever du soleil. J’y découvre le seul groupe de femmes moines de Varanasi et reste un moment face au Gange, à observer discrètement les hommes et femmes, faire leurs ablutions matinales dans l’eau sacré, et le soleil montant délicatement dans le ciel. Un indien, étudiant, en vacances en famille, viendra couper ce moment de béatitude, par curiosité et désir d’échanger. Suivant la cérémonie, les locaux font leurs exercices de yoga matinaux, que je n’aurais pas la chance d’entrevoir, bien trop occupée à discuter avec mon interlocuteur du jour.

Au cœur de l’agitation

Pour ma dernière soirée à Varanasi, j’opte pour l’un des tours de l’auberge avec l’envie de me laisser porter. Le tour débute sur une barque de Assi Ghat au lieu de crémation principal. Si c’était à refaire, je referais cette balade sur le Gange le matin quand la lumière réchauffe doucement les couleurs sur la rive.
Arrivés au niveau de Dasashwamedh Ghât, nous nous dirigeons vers le quartier du Chowk à travers les petites ruelles, nous faufilant au travers de la foule, au niveau du marché agité. Clairement pas ma partie préférée après le calme de la rive… mais nous goûtons à quelques spécialités locales dont j’ai longtemps oublié le nom.

Où dormir ? Auberge de jeunesse Moustache Varanasi, avec un super rooftop où se caler, rencontrer des gens sympas ou discuter avec le personnel.

Khajuraho

Je rejoins Khajuraho en train de nuit (départ 16h40 à Varanasi Junction, arrivée à 5h20 / 303 Rs). Il fait frais ce matin et le patron de ma nouvelle guesthouse me récupère de bonne heure à la gare. La petite pause au bord de la route pour boire un chai au coin du feu n’est pas de refus, et j’aime entendre les locaux échanger dans leurs langues.

Après avoir pris un petit-déjeuner dans mon nouveau « chez moi », mon hôte me propose de faire le tour des temples et de m’amener jusqu’aux Cascades Raneh. J’accepte avec une petite contrepartie financière.

Les temples de Khajuraho

Khajuraho est réputé pour ses temples, au nombre de 22 aujourd’hui, répartis en 3 groupes. Si vous venez ici pour admirer leurs sculptures érotiques, sachez qu’elles ne représentent que 5% des surfaces sculptées (source: Guide du Routard).
Les temples du groupe Est se visitent gratuitement et permettent de se balader dans le vieux village. Les Jaïn Temples attirent particulièrement mon attention, car leurs blancheurs semblent offrir une pureté que non pas les autres temples. C’est la première fois que je me pose des questions sur le Jaïnisme et demande à mon guide du jour quelques clés sur leurs pratiques. Le Jaïnisme serait une religion à part entière, apparue dans l’Inde antique du Xème siècle. Elle s’apparenterait à l’hindouisme et au boudhisme dans son but d’atteindre l’illumination (le nirvana) et de sortir du cycle des réincarnations. Les femmes ayant leurs règles n’ont pas le droit d’entrer dans les temples et tout élément en cuir y est formellement interdit. C’est que les Jaïns pourraient être qualifiés de « néo-vegan » puisque, prônant la non-violence, ils ne mangent ni viande, ni œuf, ni miel et ne portent rien d’origine animale. Ils n’ont pas le droit non plus de se nourrir de légumes racines, car le fait de les arracher pourraient tuer quelques vers de terre, ou la plante en elle-même.

En fin de journée, juste avant le coucher de soleil, c’est à travers les temples du groupe Ouest, classés au Patrimoine de l’UNESCO et donc payants (600 rp en 2019), que j’admire les sculptures. Celles-ci sont d’une finesse telle que j’ai parfois l’impression d’admirer de la dentelle. Je ne manquerais pas d’observer ces couples, souriant timidement, face aux fameuses sculptures érotiques, repensant à ce que me disait mon guide: les temples sont là pour enseigner, de la vie quotidienne à la spiritualité. Visiter ces temples juste avant le coucher de soleil permet d’admirer les contrastes de lumière sur les temples ocres: Magnifique !

Raneh Falls

A 20km de Khadjuraho se trouvent les Raneh Falls. Nous y allons en moto, mais il est possible d’y aller en vélo depuis la ville (comptez 4h A/R). L’entrée du parc est payante et se fait en fonction de votre véhicule. Dans mes souvenirs, c’était l’équivalent de 100 rp par personne.
Les cascades sont accessibles via un chemin tout tracé. En décembre, les chutes sont encore gorgées d’eau et atteignent de haut niveau pendant la mousson. Le reste de l’année, l’eau se fait plus rare.

Mon guide du jour prolonge la visite dans le parc adjacent, afin de potentiellement y observer les animaux sauvages. Ce bol d’air en pleine nature me fait un bien fou !

Et autres surprises

Le soir il me convie chez une amie à lui, une fermière. Je ne parle pas sa langue et elle, non plus. Je ne peux communiquer avec elle qu’à travers mes sourires et les traductions de mon compagnon du jour. Elle nous offre des chapatis et un morceau de mangue séché agrémenté de masala. C’est d’un délice ! Puis elle se met à cuire de nouveaux chapatis devant nous, tandis qu’elle échange avec mon hôte et que j’essaye de comprendre deux, trois mots. Elle nous propose alors des chapatis chauds et la nouvelle sauce qu’elle vient de préparer. Je commence à me sentir mal car je suis venue les mains vides… quelques roupies déposés honteusement dans les mains de mon hôte et nous partirons.
Ce dernier cherche à m’expliquer que la seule chose appréciable, si je veux la remercier, est de l’argent. Pour moi ce n’est pas ce que j’avais envie de lui offrir en échange de ce bon moment…

Orchha, loin du Gange

Le lendemain, il est temps de quitter ma guest house, où je n’ai finalement eu que très peu de temps pour moi ou pour rencontrer le reste de la famille. Je choisis le train qui part à 12h35 de Khadjuraho pour arriver à Orchha vers 17h06. Du moins sur le papier… J’arriverai à Orchha en fin de journée avec plus ou moins 2h de retard.

A peine arrivée dans ma nouvelle guest house, je me vois offert des samosas et un bon vieux chaï. Après avoir échangé avec un voyageur brésilien, qui me parle de signe astral, le gérant de la maison me propose de m’amener voir le lever de soleil le lendemain.

Jahangir Mahal et Raja Mahal, au fort d’Orchha

Après un petit tour en moto, M. me dépose à l’entrée du fort, où je m’acquitte des droits de passage avant de me laisser déambuler à travers le Jahangir Mahal. J’ai l’impression de retomber en enfance, grimpant les petits escaliers me menant aux étages supérieurs et m’offrant des vues splendides sur la nature au loin. Subtil mélange d’art Hindoue et Mongol, le Jahangir Mahal se visite seul ou avec un guide.
Quant au Raja Mahal, situé dans le même complexe, les splendides fresques me laissent pantoise pendant un quart d’heure. Leurs finesses sont admirables et même si le temps a laissé des traces de son passage, les 10 réincarnations de Vishnou peintes au plafond illuminent de leurs histoires.
Le fort d’Orchha et ses merveilles du 17ème siècle offrent un véritable havre de paix, photogénique au soleil levant.

Chhatris, cénotaphes royaux

Le long de la rivière Betwa, affluent de la Yamuna, elle-même rivière sacrée et affluente du Gange, se trouvent les cénotaphes royaux, construits à la mémoire des rois Bundela. Une balade mélancolique me mène d’une voute à l’autre, admirant les jardins bien entretenus et l’eau briller au loin.
Le soir si vous traversez le petit pont qui mène de l’autre côté de la rive, vous aurez un spot magnifique pour prendre le soleil couchant en photo éclairant les cénotaphes royaux de sa teinte orangé. Ce soir là, pas de dégradés de couleurs, alors nous rentrions pour assister à la cérémonie hindoue au temple Ram Raja.

Où dormir ? Temple View Guest House

Il est déjà temps de quitter la vallée du Gange et ses affluents, afin de rejoindre mon ami Australien, à qui j’ai donné rendez-vous à Agra pour le début de notre voyage entre amis. Le dernier train de disponible part tôt le matin, je dois donc me lever aux aurores pour rejoindre Jansi, la gare de départ en rickshaw.

A bientôt.

Swakopmund et l'océan

Swakopmund, désert de mon cœur

Swakopmund, mardi 21 janvier 2020.

Un article sur le vif, car j’ai besoin d’écrire. Écrire qu’ici je ne me sens pas à ma place, écrire que mon cœur n’est pas là, dans cette ville aseptisée. Écrire que je viens d’engloutir une tablette de chocolat que je m’offrais à l’époque en Nouvelle-Zélande, tu sais celle marron et blanche bien trop sucrée, en espérant que ça suffirait pour me remonter le moral.
J’ai cette boule dans la gorge, qui a du mal à passer malgré le citron que je viens d’acheter, afin d’atténuer le goût bien trop chlorée de l’eau du robinet.

Les rues sont vides, parsemées de gros 4×4 où les touristes semblent tout voir qu’au travers de leurs vitres. Les rues sont trop propres et bien trop calmes. Les jolies couleurs des façades me font penser à un parc d’attractions qui n’attirent plus la clientèle depuis bien longtemps. Un air de Queenstown, où tout semble fait pour le touriste au premier abord. Et bizarrement le rapprochement de ces deux villes si éloignées géographiquement, semble corréler avec un air de capitale des sports extrêmes.

Un mois. Je me suis engagée pour un mois auprès d’une auberge de jeunesse. Quelques heures de travail et du temps libre. Mais à peine ai-je eu posé les pieds dans ce lieu, mon cœur a eu envie de partir, de rentrer chez lui sans même visiter le pays. C’est que l’urgence de mon hôte m’a fait venir directement de la capitale, après mes quelques heures de vols. Je n’ai pas eu le temps de m’approprier les lieux, pas eu le temps de faire du Couchsurfing, pas eu le temps de me faire une première impression sur la Namibie en dehors de cette auberge, à l’atmosphère trop tranquille.

Pourtant dimanche dernier, je suis allée surfer. J’ai affronté ma peur des vagues avec une planche. Je ne sais pas encore les apprivoiser, mais je n’ai pas réfléchi et j’ai foncé. Alors pourquoi est-il difficile pour moi de dire que je m’en vais ? Que Swakopmund n’est pas assez vivant pour que j’ai envie de rester… ou que je n’apprendrais rien et que ce n’est pas ce que je recherchais ? La culpabilité me prend la tête et je sens au plus profond de moi que ça ne sert à rien de forcer.

Heureusement le sourire des quelques clients me remettent d’aplomb le temps d’une minute, même si l’envie de me glisser dans leur coffre de voiture se fait pressente. Alors peut-être que demain j’irais faire du vélo dans les dunes, peut-être que le musée de la ville m’apprendra quelques éléments rudimentaires pour survivre les trois semaines à venir… ou alors je prendrais mon courage à deux mains, mes cliques et mes claques et regarderait la liberté en face en me disant que je ne sais pas de quoi sera fait demain, mais que ma petite voix intérieure pourra surement me guider, comme elle le fait maintenant, criant « Lucie ce n’est pas toi le problème, part pendant qu’il en est encore temps ».