Campagnards, sommes-nous des privilégiés ?

Je reviens de la pelouse de mon père. J’ai enfin mis le nez dehors après une semaine et demi de confinement, suite à mon rapatriement. Vous pensez que je viens vous narguer à coup d’herbes fraiches et de pâquerettes ? Non, j’ai juste envie de déposer sur le papier ce qui me trotte dans la tête depuis un moment.

Les joies de la campagne

Petite, je crois que j’appréciais les promenades dans l’herbe, à flâner devant un papillon ou à chercher mon chat sous un arbuste. Puis est venu le temps de l’adolescence, où la mobylette n’étant pas autorisée, je ne rêvais que de ville et d’accessibilité. Jeune adulte, c’était pareil… je râlais de ce privilège des campagnes qui vous obligent à prendre la voiture pour sortir en boîte de nuit à l’autre bout de la ville la plus proche. Heureusement, j’avais un père flexible et aimant, qui venait me chercher à 6h du mat à 40 min de chez nous. Adulte j’ai déménagé maintes fois, le plus souvent en ville par praticité et préférant les transports en commun, qui ne vous obligent pas à dégivrer votre compagnon à 4 roues de bon matin. Quel plaisir alors quand je pouvais aller à pied jusqu’à mon travail.

Pourquoi je vous parle de ça ? Parce qu’en période de recherche d’emploi, je me suis rendue compte que les boulots à « haute responsabilité » étaient rares dans nos campagnes… et que si je voulais pousser ma carrière à son apogée, je devrais sacrifier mon confort et ma liberté, pour remonter m’installer à Paris, notre chère capitale. J’ai adoré mes années là-bas, mais honnêtement qui souhaiterait y retourner après des mois à gambader dans les Parcs Nationaux Australiens, Néo-Zélandais ou Ivoiriens ?
Le problème c’est que la plupart des postes qui m’intéressent s’y trouvent. Alors parfois je postule mais le cœur n’y est pas quand je m’imagine dans un appartement de 10 m2 sous les toits. Je sais pourtant qu’il y a des endroits sympas à Paris. Je me souviens d’ailleurs de cet ancien atelier d’artiste, dont la grande fenêtre donnait sur un petit jardin. Je me suis alors sentie dans un cocon en plein cœur d’une ville grouillante.

Quand je vois le nombre de parisiens ou autres français qui ont voulu quitter leur misérable cour bétonnée, alors je me suis dit que j’avais peut-être raison de vouloir me poser ce genre de question. Mais pourtant lorsque le « déconfinement » aura sonné, qui aura envie de retrouver ses amis en terrasse ou d’aller danser sur les quais de Seine, histoire de fêter cette nouvelle liberté ? Qui aura envie de rester à la campagne, seul dans son jardin, à compter les coccinelles et les quelques abeilles encore en vie ? Qui aura envie de faire des kilomètres pour aller à son travail, à nouveau coincé à l’heure des embouteillages sur le périphérique ?

Ville ou campagne, pourquoi choisir ?

Devrions-nous tous vivre en ville et avoir une résidence secondaire à la campagne ? Devrions-nous tous devoir choisir entre carrière professionnelle et confort moral ? Devrions-nous tous être amenés à vivre entassés dans des appartements mal isolés ? Devrions-nous tous vivre dans la rue ? Devrions-nous tous avoir un balcon pour aller applaudir le personnel soignant, pourtant oublié depuis plus de 30 ans ?
Ou devrions-nous tous vivre dans nos campagnes, près de nos rivières et de nos montagnes, et prendre chacun sa voiture tous les jours pour aller travailler pour nos chers patrons ? Devrions-nous tous nous mettre au télétravail ou lancer nos propres sociétés, pour pouvoir garantir un équilibre économique et moral, mais pas forcément social ? Devrions-nous tous avoir accès à un revenu universel, laissant inspirer un équilibre des classes et à chacun le soin de choisir plus confortablement son travail ?

Car si nous étions si heureux dans nos villes et nos campagnes. Si les beautés de nos montagnes étaient plus accessibles et les champs de nos campagnes moins montrés du doigts de par les pesticides. Si les enfants ne découvraient pas pour la première fois les joies de la nature sur les Champs Elysées, lorque cet été-là ils avaient été transformés en laboratoire de nos campagnes.
Et si on repensait ce petit monde en étant moins auto-centré sur nos illusions ? Et si on avançait ensemble vers moins de richesses intangibles mais plus de richesses qui s’affichent de par nos sourires, nos coup de mains et notre rapport à la terre ? Ces richesses que je redécouvre à chacun de mes voyages car j’ai tendance à les oublier, à les enfouir dans mes rêves qui ne se réaliseront jamais dans une telle société… alors peut-être que nous pourrions continuer à vivre ensemble sur cette belle planète. ♥

Photo du Leven Canyon lookout

Les plus belles randonnées de Tasmanie

J’ai passé un an en Tasmanie. Ce fût mon petit coin de paradis et de randonnées pendant mes deux années d’expatriation en Australie. J’ai même pensé y rester… pour m’y installer. Malgré une histoire sombre (Port-Arthur, éradication de tous les aborigènes sur l’île et disparition du tigre de Tasmanie… ) de petites communautés bienveillantes ont vu le jour. Et que dirais-je de la vue tous les matins en allant travailler aux vignes ? Une invitation à la nature perdue entre les montagnes immaculées et l’océan au loin ou en bas des falaises, qui nous appellent à un grand bol d’air frais. Vous venez ?

Le sommet le plus accessible: Hartz Peak

△ 7.4 km / 400 m + / 3-5 h aller-retour

Au départ d’Hobart, le Parc National du Mont Field ne se trouve qu’à 1h30 de route. Le parc offre des randonnées en Tasmanie accessibles à tous, des Chutes Russel à l’entrée du parc (compter 20min) à des treks de 2 jours à l’image du circuit Tarn Shelf (surement la plus belle balade du parc). Si comme moi, vous souhaitez une mise en bouche avant de vous lancer sur une randonnée en autonomie, vous pouvez opter pour le Hartz Peak, un joli aller-retour de 7.4 km vous permettant d’accéder au sommet du parc national. Attention la Tasmanie est une île aux 4 saisons dans la même journée, alors si arrivé au sommet haut de 1232 m, la vue est molletonnée de nuages, soyez un brin patient. Vous pourriez apercevoir au loin le célèbre Federation Peak.

Plus de détails: Au top de Hartz

La montagne la plus célèbre: Cradle Mountain

△ 12.8km / 600 m de dénivelé + / 8h aller-retour

Cradle Mountain est surement la montagne la plus connue de Tasmanie. Le Parc National Cradle Mountain-Lake St Clair regorge de randonnées à la journée, à 1h30 de Devenport et 2h30 de Launceston, la ville tasmanienne la plus peuplée du nord. Vous n’aurez que l’embarras du choix et c’est malheureusement un parc que j’ai très peu exploré. J’ai eu l’opportunité de m’aventurer sur le sommet de Cradle, la sixième plus haute montagne de Tasmanie, lors d’une journée splendide d’automne où les Fagus avaient revêtu leurs dégradés orangé. Pour atteindre ses 1543 mètres de hauteur, il ne faudra pas avoir peur de grimper d’énormes pierres. Certes moins vertigineux que l’accès au Mont Élisa (lui au Parc National Southwest), n’hésitez pas à faire demi-tour si le vent est de la partie. Il a été rude pour moi.

La petite histoire: De Lorinna à Cradle Mountain

La randonnée la plus romantique: Freycinet Circuit

△ 31 km / 2-3 jours
Coles Bay – Hasards Beach – Cooks Beach: 12km / 5h
Cooks Beach – Mont Graham – Wineglass Bay: 14 km / 9h
Wineglass Bay – Coles Bay: 5 km / 1h

Le Parc National Freycinet est réputé pour Wineglass Bay, une plage splendide et énormément photographiée. A 195km et 3h de route de Hobart, le parc est accessible via la route Coles Bay et le circuit commence sur le parking principal direction Hasards Beach. 1h plus tard, c’est sur le sable qu’il faut marcher pour rejoindre l’autre bout de la plage et continuer le long de la côte jusqu’à Cooks Beach. Le lendemain, la journée se corse légèrement avec le Mont Graham (500 m) qui offre une vue à 360° sur la nature splendide de la côte tasmane. La tente se posera le soir dans la célèbre baie. Au 3ème jour, les plages et ses eaux cristallines vous laisseront un goût d’y reviens-y. Une magnifique randonnée en Tasmanie !

Par ici: Freycinet, calme et volupté

Pour un week-end prolongé: Painted Cliffs

△ 8.8 km / 1h30 – 2h aller-retour

L’Île Maria offre une belle escapade à qui s’y aventure pour un week-end prolongé. Accessible par bateau au départ de Triabunna, Maria Island offre une pause loin de la circulation à la rencontre des animaux sauvages de la Tasmanie: les diables de Tasmanie et les Wombats en ont fait leur paradis. Plusieurs randonnées sont accessibles sur l’île nature dont la célèbre Painted Cliffs, qui nous propose 2h de balade facile au départ du centre d’informations. L’endroit est splendide avec ses dégradés ocre creusés par la mer. Là- bas, les couchers de soleil amèneront une douceur particulière à votre fin de journée sur Maria Island.

D’autres randonnées sont à retrouver ici: Maria Island, le paradis Tasman

Pour prendre de la hauteur: Tasman Peninsula

△ Cape Hauy – 8.8 km / 4h aller-retour
Cape Raoul – 14 km / 5h aller-retour

Ici je n’ai pas pu choisir… ces deux randonnées sont splendides et vous donneront un aperçu différent de la Péninsule de Tasman. La randonnée jusqu’au Cap Hauy est accessible au départ de Fortescue Bay, tandis que celle du Cap Raoul débute à la fin de la route Stormlea, juste après Port-Arthur. Ces deux randonnées offrent une journée chacune de balade et des vues lointaines et plongeantes au bord des falaises. Si vous avez un peu de temps devant vous et souhaitez prolonger l’expérience, le Three Capes Track est un trek de 3 nuits et 4 jours, alliant ces deux caps et le Cap Pillar, lui aussi accessible à la journée. Les cabanes finissaient d’être construites lorsque j’y étais et semblaient offrir une belle opportunité à la détente afin de profiter au maximum de l’environnement tasman (il vous faudra cependant un sacré budget).

Je vous emmène en balade: Quelques jours sur la Tasman Peninsula

Ma randonnée préférée: Frenchmans Cap

△ 46 km / 3-4 jours
Lyell Highway – Lake Vera Hut: 14km / 6h
Lake Vera Hut – Lake Tahune Hut: 6km / 4h
Lake Tahune Hut – Sommet du Cap Frenchmans: 1.5km / 2 h

Ce trek de 3-4 jours mériterait un article à lui seul. C’était le but ultime de mon dernier été en Tasmanie et j’ai eu une chance inouïe avec la météo clémente ce week-end-là. Nous avons croisé des randonneurs qui avaient tenté le sommet plusieurs fois et qui n’avaient pu y accéder qu’en cette journée ensoleillée. C’est pour ça qu’il est conseillé d’avoir 4 jours devant soi, afin de se laisser une journée de battement pour accéder au sommet. Cette randonnée en Tasmanie n’est d’ailleurs à recommander qu’à des personnes ayant de l’expérience. Le départ se fait à 200 km de Hobart sur Lyell Highway (A10), environ 55km avant Queenstown. Avec mon ami, nous avions laissé la tente au Lac Verra, afin de ne pas avoir à la monter avec nous jusqu’au Lac Tahune. Notre deuxième journée fut bien intense ! Si nous ne travaillions pas les jours suivant, les 4 jours complets auraient été appréciés afin de profiter d’un campement au bord du Lac Tahune, qui offre un baignade bien méritée après le sommet. Une randonnée splendide que je referais volontiers !

La plus sauvage: South Cape Bay

△ 7.7 km / 4h aller-retour

Cette randonnée en Tasmanie débute à la fin de la route la plus au sud de l’Australie: la C636, qui va de Lune River jusqu’à Cockle Creek. Juste après avoir traversé le pont de Cockle Creek, vous trouverez un parking. Je me souviens d’un joli camping, où des familles avaient décidé de se retrouver pour passer l’été. Je m’étais dit que j’y reviendrais pour profiter de la douceur des lieux. La randonnée débute à Recherche Bay et finit par une vue splendide sur l’océan. Une journée suffit pour la faire, mais attention car elle vous donnera peut-être envie, comme moi, de pousser sur un trek de 7 jours au cœur du côté le plus sauvage de l’île. Cette balade de 4h n’est en effet que le début du « South Coast Track » qui longe la côte sud tasmane jusqu’à Port Davey.

Vous l’aurez compris, la Tasmanie est une perle en matière de randonnées et rien qu’en écrivant cet article, mes chaussures frémissent à nouveau à l’idée de marcher sur les sentiers inexplorés du Parc national du Southwest, de m’aventurer sur les chemins bien tracés du Parc national de Cradle Mountain et d’enfin aller admirer les Walls of Jerusalem. N’oubliez pas vos pass obligatoires (qui aident à la régulation et à la conservation des Parcs Nationaux en Tasmanie) et tous les éléments nécessaires à une belle randonnée en toute sécurité (vérifier la météo, système des 3 couches, eau, snacks).

Pour aller plus loin: tastrails.com & parks.tas.gov.au/things-to-do/60-great-short-walks

Ma traversée des Pyrénées-Orientales en autonomie

C’était l’été 2019, je rentrais de Côte d’Ivoire et ce qui me manquait le plus de mon pays, c’était les montagnes. Toulousaine d’origine et connaissant finalement très peu les Pyrénées, j’ai décidé de me prendre les deux mois d’été pour me lancer à l’aventure du Gr10. Un faux départ et une tendinite plus tard, ce ne sera seulement que la traversée des Pyrénées-Orientales… mais quelle aventure !

De Banyuls au col del Terrers

Après mettre fait déposer à Banyuls par un couple de jeunes en van, accro à la plongée, me voilà au départ du Gr10 vers 13h. Il fait beau et un peu trop chaud, cependant la petite brise du maquis et le champs des cigales m’accompagnent tout au long de la redoutable montée jusqu’au Pic de Sailfort.
Les Grdistes, comme on nous appelle, arrivent tous dans l’autre sens mais me renseignent sur le seul point d’eau disponible entre Banyuls et le Col de l’Ouillat.
Je finis par poser ma tente en compagnie des vaches juste avant le Col des Terres car le pic de Sailfort me semblait trop exposé. Première nuit agitée avec le meuglement d’un jeune veau et quelques randonneurs téméraires encore d’attaque à minuit.

Du Col del Terres au Perthus

Réveil avec le soleil et une vue magnifique derrière ma tente. Le manque d’eau me contraint à prendre la route sans petit-déjeuner jusqu’à la cabane de Tanyadera. Heureusement quelques passages en forêt ont adouci l’atmosphère bien trop chaude de cette journée d’été. Je viens d’ailleurs de croiser un naturiste, muni de son sac léger.
Après une courte pause, il est temps de repartir au col de l’Ouillat situé juste après le Pic de Neulos pour reprendre des forces et de l’eau bien fraiche.
Petite baisse de moral après mon sandwich local, peut-être l’effet d’un retour soudain à la civilisation après les belles vues dégagées, ou alors le fait d’être partie en solitaire, rendant l’aventure plus rude.

La descente vers le Perthus est longue et chaude, et le bruit de la circulation lointaine me fait perdre haleine. Beurk ! L’arrivée au Perthus par un parking me donne envie de repartir au plus vite… mais fatiguée. Éreintée, mon étape du jour semblait encore trop longue. C’est alors que je me retrouve au fort de Bellegarde par inadvertance et quelques minutes trop tard pour la dernière visite. 1h plus tard, un brin désespérée, je demande à la guide qui vient de finir son travail, si elle connait un coin où dormir. Finalement ce sera au cœur du fort même, que je passerais la nuit.

Du Fort de Bellegarde à Las Illas

Réveil tôt mais difficile… un peu de mal à sortir de ma tente avec le bruit du vent. Finalement je remballe et finis par partir vers 8h, prenant un raccourci vers les Ruines de Panissars pour retrouver le GR. Large chemin puis route jusqu’à Las Illas, avec un brin d’ombre et quelques mûres sauvages pour tenir le coup. Las Illas semble si loin et je finis pourtant par arriver sur une aire de camping aménagée dans un petit village plein de charme. Un Tchèque dort paisiblement à l’ombre. La sieste pour moi attendra: pâtes au roquefort, douche, lessive… voilà de quoi m’occuper quelques heures avant de trouver un peu de temps pour soigner mes premières ampoules.
Je crois que le GR10 a des choses à m’apprendre sur ce besoin de toujours vouloir avancer seule et finalement lâcher-prise car il semble bon de vouloir prendre son temps. Cet après-midi sera consacré au repos, car le manque d’eau du premier jour et la montée rude jusqu’au Pic de Sailfort aura eu raison de mon tendon d’Achille.

De Las Illas au Moulin de la Palette

Réveil à 6h en même temps que le lampadaire. Je m’offre un petit-déjeuner histoire de reprendre des forces. Patrick, l’anglais qui bivouaque au même endroit, m’a dit que les premiers jours étaient les plus dur et qu’il s’était rendu compte qu’il ne mangeait pas assez au début pour bien récupérer.

La montée s’est finalement bien passée malgré ma tendinite. J’ai recroisé le nudiste avec le même sac blanc et lunettes de soleil, tel un mirage au milieu des montagnes. Bizarre…
Petit pique-nique rapide après Roc de France, puis j’entame la descente. De Montalba d’Amélie au gîte, je trouve les quelques kilomètres plutôt long. Il est temps de s’arrêter… tant pis pour Arles-sur-Tech, ça sera pour demain.

Je plante ma tente au Moulin de la Palette, profite du torrent frais pour mes pieds puis d’une douche bien chaude, avant d’engloutir un dégoutant plat lyophilisé que des hommes bien trop chargés auront eu le plaisir de se débarrasser en chemin. Merci à eux 🙂

Du Moulin de la Palette à Batère

Réveil tardif, je finis par sortir de ma tente vers 7h. A ma grande surprise elle est sèche malgré l’orage de cette nuit. J’en profite pour laisser mes affaires et préparer un petit-déjeuner chaud. Au menu: crumble pomme-banane lyophilisé offert la veille. Mais à peine ai-je eu le temps de me poser, la pluie s’est remise à tomber m’obligeant à replier ma tente mouillée.

Départ vers 8h40 alors qu’une grosse journée m’attend. Montée au col de Paracolls, avant de redescendre sur Arles-sur-Tech vers midi. J’en profite pour refaire le plein de fruits et d’encas avant de me renseigner à la pharmacie sur les tendinites. Réponse attendue: du repos.

Je continue tout de même ma route, prenant le temps de pique-niquer sur les hauteurs d’Arles-sur-Tech, ce joli petit village médiéval, et d’envoyer des signes de vie à ma famille. Puis j’entame la plus longue des montées… avec 1168m de dénivelé positif avec déjà 3h de randonnées dans les pattes.
La dernière heure est bien fraiche avec l’altitude et le vent des montagnes. L’atmosphère a changé depuis Banyuls. Une communauté s’est d’ailleurs installée au creux des montagnes, elle me ramène gentiment à Lorrina. L’odeur du feu me remotive, jusqu’à ce que je finisse par me retrouver à marcher sur le goudron.

Au gîte de Batère, il fait chaud et j’ai envie de me glisser dans des draps propres. Je prends cependant l’option bivouac un peu plus loin, à côté des mines. De retour au refuge pour une douche, la vue du plat du soir aura raison de moi ! Je décide d’opter pour l’option moussaka, en compagnie d’une famille venu faire le Tour du Canigou. Un brin de compagnie et une bonne douche plus tard, me voilà réchauffée pour ma nuit en bivouac.

Du refuge de Batère au refuge des Cortalets

Réveil avec le soleil et départ vers 8h. Aujourd’hui, on y va doucement.
Les paysages changent et je commence à trouver quelques cascades. J’atteins la cabane du Pinatell juste avant midi et profite d’une pause au soleil avant que d’autres randonneurs ne viennent. Deux locaux de 70 et 74 ans débarquent avec leurs cèpes fraichement cueillis et du bon vin rouge local. On parle de la Côte-d’Ivoire au milieu des Pyrénées, de randonnées et de tendinite. Deux militaires retraités et beaucoup d’humour à la clé. Ah que je les aime les gens du coin, les gens des montagnes !

Après une longue pause en bonne compagnie, j’attaque la montée douce jusqu’au croisement, puis corsée jusqu’au refuge des Cortalets via l’ancien GR10 (variante). J’y découvre une épave d’avion et une magnifique vue donnant jusqu’à la mer.
J’installe mon bivouac dans un coin sympa à côté du refuge avec une vue sur les montagnes… mais pas de douche chaude cette fois.

Du refuge des Cortalets à celui de Mariailles

C’est le Jour J ! Le jour du Pic du Canigou, hors GR. J’avais dit aux deux bons vieux militaires que je m’arrêterais peut-être après avoir gravi le Pic du Canigou, que je pensais à défaut le plus haut sommet des Pyrénées-Orientales (et non, c’est le Carlit !).

Départ des Cortalets vers 8h et montée via le Pic Joffre. Je finis par arriver au sommet vers 10h30 avec mon gros sac et ma tente. Quelques photos plus tard, j’appréhende la descente de la cheminée pour rejoindre Marailles. A force de demander des renseignements, une néerlandaise marchant sur le GR11 côté espagnol, me propose de m’accompagner sur la descente. Finalement pas d’encombre… ce qu’on me disait vertical et dangereux à descendre, se révèle être la partie la plus facile ! La descente totale jusqu’au prochain refuge s’annonce longue… très longue. Alors je me pause dans l’herbe pour le pique-nique avec une magnifique vue, dorant au soleil et à deux doigts de m’endormir.

Je finis par arriver au refuge avec Chriss et ses deux enfants, qui font la traversée des PO (Pyrénées-Orientales) en une semaine. Un vieux papi me disait que mon sac était mal réglé, alors Chriss en a profité pour papoter et j’ai fini par passer la soirée avec eux. J’ai dormi au refuge gratuit adjacent, en compagnie d’un vieux espagnol qui a pour projet de grimper tous les pics alentours, et qui à passer la nuit à me réveiller à coup de « joder ! joder ! ». Finalement dormir en tente se révèle être un luxe.

Du refuge des Marailles au Ras de la Carança

Se devait être un jour « sans » pour moi, mais Chriss et les enfants m’ont motivé pour atteindre le refuge du Ras de la Carança dans la soirée, pour pouvoir profiter des gorges du même nom, hors GR, le lendemain. Réveil courbaturé et en speed, car la cabane se révèle plus sombre que la tente, et mon réveil habituel avec le soleil s’en est retrouvé perturbé. Je suis en retard… nous devions partir à 7h et mon sac n’est pas fini. Chriss et sa petite famille m’attendent un peu puis finissent par partir.
Je ne les reverrai jamais… ni à Py, ni à Mantet, ni au refuge que je finis par atteindre paisiblement.

De Marailles à Py, je suis un GR de pays qui permet d’éviter le Col de Jou et espérer retrouver la joyeuse troupe. Un brin de ravitaillement à Py où se déroule la brocante du 15 août, j’opte pour un brin de stop jusqu’au col de Mantet (ce qui me fait gagner 2h et m’évite de marcher sur le goudron) dans l’espoir de rattraper les autres.
A Mantet, je croise un randonneur qui débute à peine et me donne des conseils pour ma tendinite et me dit d’éviter le saucisson. Il me propose de m’accompagner mais ne voulant pas le retarder avec ma petite cadence, je le laisse prendre de l’avance. J’en oublie de prendre en photo la petite place toute mignonne de Mantet dans la précipitation.
Dans ma montée vers le Col de Pal, je croise un couple du coin qui m’affirment que le meilleur de la Carança est encore plus haut au niveau des lacs… et bien, je verrais au matin ce que je décide de faire.

Arrivée tardive vers 19h, coincée par un troupeau de vache en plein milieu du chemin… c’est aussi ça les joies du GR10 ! Je n’ai pas le temps de sympathiser et recueillir quelques renseignements, car à peine ai-je fini de manger que tout le monde dort déjà. Je passerai la nuit à côté d’un torrent.

Jour de repos au Ras de la Carança

Il ne reste que deux ou trois tentes lorsque je me lève. Je discute avec les voisins, qui vont aussi passer une autre nuit au Ras de la Carança. Je pars me renseigner au refuge pour savoir combien de temps prend la descente des gorges. L’option de monter aux lacs me tente, mais je décide de ne rien faire de la journée. Je la passerai à lire auprès du torrent.

Le soir, l’arrivée des nouveaux campeurs me sort de ma solitude mais la fatigue finira par m’emporter vers 20h.

Du Ras de la Carança, à Thues-les-Bains jusqu’aux Bouillouses

Les courbatures sont parties mais le départ avec la tendinite au repos tire… La descente des gorges est sympa mais finit par s’étirer en longueur. Arrivée au petit kiosque, le gardien me dit que le petit train jaune se prend un peu plus haut, départ 14h30. J’ai deux heures devant moi pour prendre un sandwich.

Le Petit Train Jaune (6€) me dépose à Bolquère où je récupère le GR10. C’est l’occasion de faire le plein de produits locaux et d’eau avant d’entamer la montée à travers les pins sur de larges pistes peu intéressantes. Sortie de là, les Bouillouses semblent encore loin. Le GR10 ne passe pas par l’étang de la Pradelle et je suis obligée de suivre la déviation menant à l’Etang Nègre. Le coin me rappelle le Canada et les bords du lac sont idéals pour bivouaquer. Malheureusement l’eau potable me manque et je suis obligée de pousser jusqu’au lac des Bouillouses.

Il fait déjà presque nuit lorsque j’arrive au barrage. Les couleurs sont belles au loin. Les gens campent agglutinés à côté de leur voiture. Après avoir rempli mes 3L d’eau, je continue au bord du lac dans l’espoir d’atteindre le bout et camper vers le ruisseau. Trop tard… je poserai ma tente près du GR10 sur une zone plate, avalerai ma soupe et la saucisse/fromage du jour pour enfin me coucher vers 22h30.

Des Bouillouses aux Bésines

Levé tardif (8h), pliage de tente rapide avant de prendre un petit-déjeuner avec vue sur le lac. Mais c’était sans compter les chevaux sauvages qui ont décidé de débarquer et de venir renifler la moindre de mes affaires, emportés par leur curiosité. Mon quignon de pain à la main, j’ai du jouer les contorsionnistes pour récupérer mes biens, priant pour que la femelle devant moi et son poulain évitent d’écraser mes bâtons de marche posés sur le rondin de bois.

Je pars un peu plus loin emportant tout à la main, recouverte de bave de cheval. Quelques couples de randonneurs se réveillent après la limite imposée par le camping sauvage du parc. C’est vrai que la vue est belle avec le soleil scintillant sur le lac, dont j’avais un souvenir moins artificiel de mon enfance…
Je commence ma rando vers le 1er pic du jour: la Portella de la Grava. Les paysages sont splendides.

La montée est longue et je m’octroie une pause vers la cabane de Rouzet. Le second col (Coma d’Anyell) s’annonce compliqué après le repas. Mes forces m’arrêtent au refuge des Bésines après une longue descente dans des paysages spectaculaires. Une douche chaude, un brin d’écriture et ce sera déjà l’heure de me réfugier sous ma tente, pour une nuit d’orage.

Du refuge des Bésines à Merens-les-Vals

J’aurais pu continuer encore un peu… mais une tendinite au talon d’Achille ne doit jamais se prendre à la légère. J’ai d’ailleurs forcé et poussé, et la fin aurait pu être désastreuse. Fort heureusement l’eau ne manquait plus dès le 2ème jour et j’ai appris à me pauser lorsqu’il était nécessaire. Aujourd’hui sera donc le dernier jour de cette belle aventure. Il m’aura fallu un peu de temps pour déconnecter, mais passer le cap, la routine s’installe et la montagne se dévoile.

Du refuge des Bésines, je descends doucement jusqu’à Mérens-les-Vals. Un dernier col dans le brouillard et c’est une pluie finie qui m’accompagnera jusqu’au bout, me laissant entrevoir les fleurs sauvages de la vallée. C’est magnifique mais je suis fatiguée.

Juste avant Mérens-les-Vals, je croise un groupe de promeneurs venus profiter des bains d’eau chaude naturelle. Trop de monde, je me dirigerais vers le village vide et la gare… vide elle aussi. Les trains ne s’arrêtent plus à Mérens-les-Vals.

Les chaussures pleines de boues et la dégaine transpirante, j’opte pour du stop jusqu’à Ax-les-Thermes. Pas le choix. Une femme et deux de ces enfants me prendront au passage, et je raterais le train de quelques minutes… Quelques heures plus tard et un RER, je prendrais un bus pour rentrer chez ma mère à Toulouse. C’est la fin d’une aventure, celle de la traversée des Pyrénées-Orientales… mais quelle aventure !

Quelques ressources: www.gr10.fr

Histoire d’un rapatriement

A défaut de pouvoir approcher une personne à 1m, à défaut de pouvoir raconter mon histoire dans la dernière étape qui me rapprochera du lieu nommé « home », c’est à vous que je vais l’écrire.

Je suis partie en janvier dernier, après quelques mois de confinement volontaire à chercher un sens à ma vie dans une nouvelle période sans emploi difficile. Je suis partie faire un bout de chemin sur le continent africain, là où j’avais laissé mon âme la dernière fois… à travailler en Côte d’Ivoire. Je suis partie en janvier et devais revenir pour le mariage d’une amie. Mon itinéraire devait me permettre de retrouver l’inspiration, de décider ou non si j’allais investir sur ce continent prometteur et de rebooster le moral que j’avais perdu depuis mon retour en France, isolée par ma période d’inactivité professionnelle.

De la Namibie, à l’Angola, j’ai suivi les informations à distance, m’éloignant des réseaux sociaux, ayant une nouvelle énergie à partager avec les personnes rencontrées. A entendre parler du coronavirus, c’est sur France Diplomatie que j’allais régulièrement pour vérifier les éventuelles restrictions. Rien n’était à signaler en Afrique, le continent à l’époque sauvé du Covid-19.

Pendant ma dernière semaine à Luanda, les choses se sont précisées dans le nord du continent et mes dernières destinations semblaient commencer à restreindre leurs frontières. J’avais pris un billet d’avion pour Sao Tomé avant même de rentrer sur le territoire Angolais, mon visa me l’obligeant. Après Sao Tomé, je devais rejoindre l’Afrique de l’Ouest pour remonter du Bénin, au Togo jusqu’en Côte d’Ivoire ma destination finale. Mais le Bénin conseillait à leurs ressortissants français de repousser leurs voyages. Je me suis alors dis que je rejoindrais directement la Côte d’Ivoire et qu’au pire des cas, je pourrais me confiner chez l’amie d’une amie à Abidjan.

Sauf qu’à peine arrivée à Sao Tomé, les choses sont allées très vite. Mr Macron a prononcé son discours, et tous mes amis et proches se sont empressés de me dire ce que je devais faire : rentrer au plus vite. Mais il était déjà trop tard. Ils n’ont réussi qu’à me créer une atmosphère anxiogène au possible, que je n’avais pas eu jusque là sur le continent africain. A coup de message toutes les heures, à coup de question pour savoir ce qu’il se passait et ce que j’avais décidé, ils m’ont aidé à stresser au maximum et n’ont pas réussi à me faire prendre du recul sur la situation.

Dès le discours prononcé, j’ai pris contact avec la consule honoraire de Sao Tomé, afin d’avoir enfin des réponses aux questions que j’avais posé à d’autres ambassades de France bien avant ce discours et qui sont restées sans réponse.
La consule m’a conseillé de prendre le prochain vol avec la compagnie Stpairways, qui était complet puis le dernier vol daté du 28 mars. J’ai cherché à changer mon vol du 26 mars pour Abidjan, pour un retour immédiat en France, mais les compagnies et services en ligne semblaient débordés par la situation. Mon vol du 26 a finalement été annulé. Puis celui du 28.

Bien sur, je suis tombée malade. Le stress n’a jamais fait du bien au corps humain. Alors j’ai voulu écrire sur les réseaux sociaux, mais les gens se sont énervés contre moi car je n’avais cas prendre mes responsabilités. Au moment où j’avais besoin de soutien, on m’enfonçait. Heureusement que les proches étaient là, mais même à distance leurs stress semblaient s’emparer de moi.

Lundi, la consule qui a crée un groupe whatssap avec tous les touristes français de l’île, nous dit qu’un vol TAP devrait être mis en place le lendemain pour nous rapatrier vers Lisbonne. « Passez tous à la TAP aujourd’hui ». Ah ça j’ai visité le bureau Sao Toméen tous les jours, afin d’être sûre d’être sur la liste : « oui vous l’êtes bien mais l’avion est décalé au 25 ou 26 ». Le jour du paiement, la directrice de la TAP me dit que je ne suis pas sur la liste alors que je viens de parler à des locaux (jamais vu avant au bureau de la TAP) venant d’acheter leur billet. « Comment ça je ne suis pas sur la liste ? J’ai suivi toutes vos instructions et suis venue tous les jours pour vérifier si j’étais bien sur la liste ! Et maintenant vous me dites que non ? L’avion part demain, que dois-je faire ? » La directrice me dit de me réinscrire et de repasser au bureau le lendemain.

Jeudi 26 mars. Je me lève tôt dans un état lamentable. Je file au bureau de la TAP sous un soleil ardent et attend l’arrivée de la directrice, qui finit par me dire « vous n’êtes pas sur la liste, je n’ai pas de place pour vous, l’avion est complet ». 5 min avant des personnes que je n’avais jamais croisées venaient d’acheter leurs billets. On me dira plus tard que c’était des « fils de ».
J’appelle la consule qui me dit que ce n’est pas normal, que j’étais l’une des premières sur la liste. « Passez chez moi ».

Chez la consule, on parle un peu de la situation puis elle me dit qu’elle va à l’aéroport dans 30 min et que je dois venir avec elle. Je repars chez mon hôte en stress pour faire mes valises et je file à l’aéroport avec elle. Sur le chemin elle continue à passer des coups de fils… à l’arrivée elle me dit : « c’est bon, on a un billet pour toi, pars vite à la TAP pour payer ». Arrivée à la TAP, la directrice me dit que Dieu est avec moi, car elle vient d’avoir deux annulations. Je pense bien fort : « c’est ça oui ». Je paye mon billet au prix fort, 4 fois le prix habituel pour un aller simple en enfer. Le chauffeur me ramène à l’aéroport où les gens ont l’air content de pouvoir rentrer. Moi je me démène avec ma connexion Internet pourri et une copine sur whatssap pour me trouver un billet d’avion décent pour pouvoir rentrer chez moi. Deux jours avant les billets Air France étaient encore à 200 euros, le jour même il ne reste que des places business… après le check-in, je cours me connecter pour pouvoir réserver. Les billets s’envolent et je dois embarquer.

Les journalistes sont là à filmer notre montée dans l’avion. Je m’assois puis réalise que je n’ai pas eu le temps de dire au revoir, même si le guide qui m’a soutenu pendant cette épreuve, est venu me voir à l’aéroport en larme.
Le vol se passe sans encombre, avec deux micro-sandwichs au fromage et un verre d’eau. Je souris. Je crois que ça y est, tout commence à me passer au dessus. La goutte d’eau de la libération. Je ne peux plus faire de retour en arrière, alors autant laisser couler.

Arrivée au Portugal, je reçois le message de mon amie qui a réservé un vol pour moi. Je me rapproche d’un couple de français et d’un autre voyageur. Un peu de compagnie pour passer la nuit par terre, ne fera pas de mal. On discute, on décompresse et je m’octroie un pastel de nata. Ma première fois à Lisbonne se passera dans un aéroport frigorifique.
Après notre courte nuit, on montera dans l’avion nous menant à Paris, moi en business class, eux en économique. Un sandwich plus tard, alors que mon voisin de dernière qui n’arrête pas de raconter de la merde aura un vrai repas, je ressors de l’avion. Le commandant de bord me souhaite bon courage pour la suite de mon voyage jusqu’à Toulouse… les larmes montent.

Il est temps de traverser Paris en RER pour aller jusqu’à l’aéroport de Orly. Je prends mon billet comme une bonne citoyenne et réalise que les transports sont gratuits. Au point où j’en suis… mon RSA est déjà passé 4x à la caisse.

Arrivée à Orly, l’Orlyval ne va pas jusqu’aux hôtels. Je traverse donc l’aéroport à pied avec mon sac et mon système immunitaire au plus bas. Je trouve une place, m’installe dans ma chambre, prend une douche puis reçoit un email : « votre vol Air France Paris-Toulouse vient d’être annulé. Nous vous avons trouvé un vol dimanche ». Elle est où la caméra cachée ?! J’appelle Air France, qui me dit que si je ne me présente pas, je serais automatiquement remboursée. Vraiment ?! J’ai des doutes… cela expliquerait pourquoi j’ai du payer un billet au prix fort alors que la moitié des places économiques sur le vol Lisbonne-Paris étaient vides ! Je m’achète un ticket SNCF, en espérant que lui sera maintenu le lendemain. Mon guide m’appelle et je m’endors sans manger.

Aujourd’hui j’ai retraversé Paris, j’ai pris un bus et me trouve à la gare Montparnasse. Frigorifiée, j’attends gentiment que mon train soit mis en place en espérant qu’il soit bien là. Je suis censée arriver chez moi ce soir, avec la peur au ventre de contaminer mon père du Coronavirus.
Lisbonne, Paris, Toulouse… j’ai traversé tous les plus gros nids à infection (aéroports, métro, bus et gare) alors que la Namibie, l’Angola n’ont que quelques cas déclarés à ce jour.

Alors comme une gentille fille, j’ai suivi tous les conseils des autorités. Mais aujourd’hui, je me demande vraiment si j’ai bien fait. Après avoir été l’actrice principale d’un James Bond, je me demande si je me pardonnerais la dernière étape : avoir pris le risque de contaminer tous mes proches, alors que j’aurais pu resté confiner à Sao Tomé le temps que ça se tasse.

Personne n’a de certitude sur l’avenir alors mieux vaut être chez soi, en sécurité, c’est sûr. Mais la question ne mérite-t-elle pas de se poser ?
Je ne remercierais jamais assez la consule de Sao Tomé, qui de part son travail bénévole et volontaire, nous aura permis de rentrer en France. J’espère que le gouvernement français ne l’oubliera pas.

Aujourd’hui, j’ai peur pour l’Afrique et pour les plus pauvres qui ne pourront rester confiner chez eux. Je rentre encore plus diminuée moralement que lorsque j’étais partie en début d’année. Mais je sais que j’ai de la chance: encore beaucoup de français se retrouvent coincés à l’étranger et les autres nationalités n’ont pas forcément les mêmes moyens que nous.
Alors à tous ceux qui ont du mal avec le confinement, je vous dirais que c’est le bon moment pour vous regarder en face. Lisez les Pensées de Pascal, à la page roi et divertissement.

Cordialement.