Updated on décembre 29, 2024
Le Tour du Queyras en hiver : le GR 58 en raquettes
Le Parc naturel du Queyras, je l’ai découvert un peu par hasard pendant une recherche d’emploi. J’avais envie d’allier mes compétences professionnelles à la montagne et une offre s’était présentée à moi. De fil en aiguille, j’ai voulu y aller plusieurs fois. Mais au départ de Toulouse, la route semblait longue et sans alternative en transport en commun. J’ai donc fini par remettre ce projet à plus tard… jusqu’à cet hiver de janvier 2022. Une semaine de vacances et c’était l’heure de partir à la conquête des Alpes, après plus de 2 ans à opter pour un tourisme ultra-local. Voici mon aventure : le Tour du Queyras en hiver.
- Toulouse – Ville-Vielle
- De Ville-Vieille à Saint-Véran
- De Saint-Véran au refuge de la Blanche en raquettes
- Le pic de Caramantran, 3000 des Alpes, en raquettes
- Du refuge au pic du Caramantran, par le Col de Saint-Véran
- Du pic de Caramantran au refuge, par les lacs Blanchet
- Du refuge de La Blanche à Saint-Véran
- De Saint-Véran à Ville-Vielle à pied, puis Aiguilles
- Bonus : les chalets de Clapeyto
Toulouse – Ville-Vielle
Optant pour du covoiturage, la route passe d’arrêts aux abord de l’autoroute en conversations. Nous finissons par arriver tard le soir, jusqu’à un petit village du nom de Montbardon. Nous devions à la base dormir directement sur Ville-Vieille, mais les propriétaires ont annulé notre réservation pour cause de Covid. Même en vacances, il nous rattrape. Heureusement j’ai fini par trouver un petit Airbnb de dernières minutes avec des locaux flexibles. Après une montée glacée qui nécessitait des chaînes, à des virages serrés, nous finissons par atteindre le village, où nous ne trouvons pas un chat. Garés prêt de la fontaine, nous avançons vers les maisons afin de trouver notre coin pour la nuit. Un aligot et de la confiture de « grate-cul » plus tard, il est temps de rejoindre Ville-Vieille, notre point de départ.
De Ville-Vieille à Saint-Véran
Distance : 11 km
Dénivelé : 888 m D+ | 250 D-
De Ville-Vieille, nous empruntons le chemin qui bifurque vers la gauche, vers le Sommet Buchet. Nous nous enfonçons rapidement au cœur de la forêt, grimpant doucement vers un brin de soleil. On chausse rapidement les raquettes. Il n’a pourtant pas neigé dernièrement, mais le sentier semble finalement peu fréquenté et nos pieds s’enfoncent au creux d’un nuage blanc, légèrement croustillant.
Certains passages en côte montent fort, l’échauffement semble déjà dernière nous. Il ne faut pas s’arrêter très longtemps, pour garder la chaleur de la montée. Quelques touches de soleil semble se faufiler à travers les arbres. Lorsque la vue se dégage, je propose une pause déjeuner, dans un coin ensoleillé.
Finalement la pause sera courte. Le temps d’un sandwich et le froid nous gagne. Nous continuons donc notre route en direction de Molines-en-Queyras. La vue s’ouvre complètement et nous quittons la forêt pour regarder l’autre versant. Nous sommes encore loin de Saint-Véran, mais la neige s’enfonce encore plus profondément. J’envie l’autre côté, celui gorgé de soleil en cet hiver alpin. J’espérais pouvoir le rejoindre ce coin chaud, cet écrin de lumière, ce semblant de chaleur sur mes joues brunies de froid. Le chemin devient coquin avec des passages sympas. Heureusement que je ne suis pas la première à faire des traces. Saint-Véran finit par se rapprocher et nous rejoignons ses routes gelées pour enfin se réchauffer au cœur de notre gîte du soir : les Gabelous. Une chambre pour deux, un repas pour plusieurs groupes, et c’est la fin d’une première journée d’hiver sur le Tour du Queyras qui s’achève.
De Saint-Véran au refuge de la Blanche en raquettes
Distance : 8,4 km
Dénivelé : 549m D+
Nous quittons notre gîte tout confort avec nos chaussures un brin humide de la veille. Les boules de journal laissées à disposition ont fait leur affaire pour éponger le plus gros pendant la nuit. Je suis contente de quitter le côté forêt et j’imagine que la journée va être plus chaude que la première, de ce Tour du Queyras en hiver.
Au départ de Saint-Véran, nous empruntons la piste qui mène jusqu’au refuge de la Blanche. Celle-ci est damnée et les raquettes ne sont pas nécessaires. Nous faisons demi-tour pour récupérer le GR® 58, qui nous mène sur un chemin plus propice à l’amusement. La lumière matinale rase délicatement les montagnes d’une douce couleur orangé et nous profitons de cette avancée pour happer la beauté des paysages, qui se présentent à nous. La petite chapelle de Clausis se pose comme un point de repère et nous finissons par la rejoindre vers 12h.



« Et si nous profitions de la chapelle pour faire une pause déjeuner au soleil ? » Il était un peu tôt certes, mais j’avais le pressentiment que c’était le bon moment. Nous sortons nos victuailles. Le temps d’un sandwich et d’un carré de chocolat, nous voyons le soleil descendre rapidement jusqu’à atteindre les montagnes. Mon compagnon de route est gelé. Il commence à partir, tandis que je suis encore entrain de me dépatouiller avec mes raquettes. Pas le temps de digérer, le froid est tombé violemment et il faut absolument marcher pour se maintenir à flot.
De la chapelle au refuge de la Blanche, mes doigts s’endolorissent. Mes gants de ski sont à l’arrière de mon sac. Je reste avec mes gants de rando, cherchant désespéramment à les réchauffer, tout en marchant le plus vite possible pour rattraper mon compagnon de randonnée. C’est dommage. Les paysages autour de nous sont grandioses, mais l’ombre et le froid ne me permettent pas de les capturer. Ils nous laissent seulement avec la promesse d’un doux lendemain.



Nous finirons par atteindre le refuge tôt dans la journée, ravis de pouvoir se réchauffer au coin du poêle. Petit tour dehors pour prendre la température, le tour du lac gelé se finira au cœur d’un igloo déposé là.
Le pic de Caramantran, 3000 des Alpes, en raquettes
Distance : 6 km
Dénivelé : 527m D+
En boucle
Du refuge au pic du Caramantran, par le Col de Saint-Véran
Nous avions décidé de rester 2 nuits au refuge de la Blanche. Et quelle bonne idée ! Un refuge 6 étoiles avec des repas de fou et un cadre exceptionnel. Sans le savoir, nous faisions la même route que deux groupes constitués, l’un à raquettes, l’autre à ski de rando. Les guides au top n’ont pas hésité à nous conseiller plusieurs fois et les gardiens du refuge également. C’était décidé : nous partions pour le Caramantran, un sommet finalement accessible en raquettes.
Pour se faire, nous empruntons le chemin longeant l’extrémité nord du lac, pour rejoindre le Col de St-Véran. La montée se déroule tranquillement grâce aux traces d’un groupe partis devant. Nous finissons par les doubler et suivons nos compères de table et de chambre, qui nous ont proposé la veille une gorgée de rhum venu tout droit de La Réunion. Ces derniers montent en ski de rando avec un bon rythme. La vue est grandiose et je n’arrête pas de m’arrêter pour prendre des photos.





Arrivés au col de Saint-Véran, l’Italie montre le bout de son nez. J’ai hâte de me trouver en haut des 3004 mètres du Caramantran pour avoir une vue à 360°. Depuis le début de notre périple, nous n’avons pas eu un seul nuage dans le ciel. C’est l’un des premiers jours, cependant, où nous profitons pleinement du soleil. Le pique-nique sommital, s’apprécie délicieusement, l’œil aguerri sur les sommets enneigés. Au moment de redescendre, nous croisons la guide et son groupe en raquettes. Elle nous montre au loin le sommet du Mont-Blanc et nous confirme que nous avons bien de la chance avec un temps si dégagé.
Du pic de Caramantran au refuge, par les lacs Blanchet
Pour redescendre, nous décidons de continuer tout droit au niveau du col de Saint-Véran pour rejoindre la variante du GR58. Le coin est moins fréquenté et la neige se gagne raquettes aux pieds. Mais quel délice de pouvoir faire ses propres traces, avec une sensation de poudreuse ! Nous devinons les contours du Lac Blanchet Supérieur recouvert de neige et rejoignons le lac inférieur. Dos à nous, le col Blanchet en impose et je repense aux compères de la veille qui avaient décidé d’y monter en ski de rando. Nous descendons le Vallon du même nom, à l’ombre cette fois, jusqu’au Lac de la Blanche. La journée a été excellente. Le soleil et la qualité de la neige y sont surement pour quelque chose et nous profiterons de nouveaux compagnons de table et d’un brin de génépi maison, pour clore notre dernière soirée au refuge de la Blanche.


Du refuge de La Blanche à Saint-Véran
Distance : 9,8 km
Dénivelé : 511m D-
Je crois n’avoir jamais aussi bien dormi pendant une nuit de pleine lune. Il est malheureusement temps de quitter la douceur du refuge, pour redescendre sur Saint-Véran, le plus haut village d’Europe.
Nous décidons de prendre un chemin différent que celui à l’aller, légèrement plus exposé au soleil. Du refuge, nous traçons tout droit vers le Petit Canal. Nous croisons nos compagnons de route, qui avec leur guide, partent en ski de rando vers un nouveau col, inaccessible en raquettes.


Nous finissons par apercevoir la chapelle, qui quelques jours plus tôt, nous avez servi d’appui pour notre pause du midi. Le soleil matinal rase avec mélancolie les couleurs hivernales. Je sens que le meilleur est déjà dernière nous, malgré les paysages splendides. Nous finissons par rejoindre le Petit Canal et devinons la mine de marbre, qui s’écoule en éboulis à nos pieds. Le vert scintillant de la pierre m’éloigne un court instant de mes pensées gelées. Il faut savoir que j’ai horreur de la glace et les prochains kilomètres vont être délicats pour ma part.


Le chemin est pourtant plat. Je trouverais péniblement chaque prétexte pour marcher sur la terre ou la neige, qui paraît encore assez craquante pour que je m’y enfonce. Mon hiver à Montréal semble déjà loin. Les matinées à descendre la rue de Champlain gelée sont révolues. Je ne sais si c’est l’âge qui me fait prendre conscience des risques ou une peur qui s’est inconsciemment glissée jusqu’à moi… mais le chemin qui semblait sympa de loin, se transforme en une mauvaise partie de poker. Après des heures qui me parurent éternelles, nous retrouvons Saint-Véran avec le temps devant nous, pour en faire le tour et apprécier ses multiples constructions faites de bois. Les beaux cadrans solaires de la plus haute commune habitée d’Europe me feront oublier mes péripéties. La montagne s’apprécie aussi au cœur des villages, autour d’une bonne gaufre locale.


De Saint-Véran à Ville-Vielle à pied, puis Aiguilles
Distance : 13,4 km
Dénivelé : 281m D+ | 885m D-
Le lendemain, il ne nous reste qu’une journée de marche avant de retrouver notre voiture. Nous voulions de Saint-Véran continuer jusqu’à Aiguilles, pour ensuite rentrer à Ville-Vieille. Mais nous avons décidé d’adapter notre parcours aux conseils des connaisseurs du coin. De Saint-Véran, nous nous dirigeons donc vers Pierre Grosse, pour ensuite continuer vers Prat Hauts afin de redescendre vers notre point de départ.
De la dernière habitation saint-vérannaise, nous croisons un patou, un magnifique chien de montagne des Pyrénées, qui s’approche vigoureusement après avoir aboyé goulument. Finalement il nous suivra sur notre première demi-journée, nous accompagnant fièrement jusqu’à notre 1er arrêt. Une petite pensée au Tour du Val d’Azun pour ma part, et je finis par mourir de honte lorsque arrivés sur une piste de ski que nous devons longer, notre gentil compagnon du jour se remet à aboyer et à courser les skieurs, à moitié confiants, à moitié craintifs. Ils mettent du temps à réaliser que le chien blanc comme neige, ne nous appartient pas et que nous n’avons aucun moyen pour le faire obéir, à part marcher vigoureusement vers nos destinations, espérant qu’il nous suive.
Nous reprenons notre route et finalement de Pierre Grosse à Vielle-Vieille ma mémoire faiblit. La neige n’est plus. La glace a repris le dessus; le dessus sur ma confiance, sur ma joie en montagne, sur ma liberté ressentie en randonnée, sur ma capacité à marcher, à avancer, à prendre du plaisir. J’ai passé des heures à me remettre en question et j’ai fini par faire de cette journée un lointain souvenir.
Bonus : les chalets de Clapeyto
Distance : 8,7 km
Dénivelé : 582m D+ | D-
Après une nuit dans une auberge à Aiguilles, nous prenons la route pour Arvieux puis Brunissard, où nous rejoignons le parking du restaurant le Jamberoute. D’ici, nous traversons les pistes de ski de fonds, empruntant le GR5 pour l’Eychaillon. De là, nous suivons les quelques groupes de soixante-huitards qui se dirigent à raquettes vers les chalets de Clapeyto. Le temps d’une pause déjeuner, agrémentée des délices du coin, nous laissons les constructions dernière nous pour œuvrer notre retour par Le Collet. La neige est ici plus sympa avec un peu moins de passage, et je regrette doucement les journées sauvages du Queyras, où l’on se croyait seuls au monde.



Notre hôte du soir nous parlera du temps où les chalets de Clapeyto étaient réservés aux gens du coin. « Petite, on y allait fin juillet pour y passer l’été, à l’époque où il y avait encore des alpages. Aujourd’hui c’est les touristes qui ont pris le dessus, et même si nous y avons toujours notre cabane, la forte fréquentation ne rend point hommage au charme de ces étés d’antan ».
Le tour du Queyras en raquettes fut une belle aventure. Un premier trek hivernal pour ma part d’une semaine, inspiré des agences locales. Le coin semble fréquenté en été et l’hiver, la priorité est donné aux skieurs. Les randonneurs sont tout de même bienvenus et je pense que le moment était optimal pour profiter du côté sauvage du parc naturel régional. Je reviendrais dans le coin lorsque les mélèzes auront revêtu leurs couleurs feux à l’issue de l’automne. Et vous, connaissez-vous le Queyras ? ♥
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Updated on décembre 10, 2021
Paradoxe
Je suis capable de tout quitter pour aller découvrir le monde
De m’aventurer en stop au cœur d’un pays, où on me dit que c’est impossible.
Capable d’aller dormir sur le canapé de personnes que je ne connais pas,
Heureuse d’échanger un sourire avec un inconnu,
Mais incapable de traverser la rue pour aller déposer un CV.
Je suis capable de partir traverser les Pyrénées,
Malgré la peur que me mettent les autres en face
Ours, violeurs, chasseurs.
Je crois encore à la bonté humaine
Et pourtant, je peux en vouloir à quelqu’un pendant très longtemps.
Le mouvement me fait aller de l’avant.
Même si une balançoire part en arrière, je pense toujours que c’est pour prendre de l’élan et mieux sauter.
Je vois le positif dans le mouvement et le négatif dans la stagnation.
Une eau stagnante, ça attire bien les moustiques non ?
Je sais danser au milieu de la foule, me laisser guider par la musique,
Autrefois je montais sur les podiums, aujourd’hui cela m’est interdit.
Je peux commencer un projet artistique, puis une fois fini, une fois que je sais que je peux le faire,
mon esprit passe à autre chose. Un autre projet et vite !
Et pourtant là, je n’en ai pas.
Je suis capable de m’enfermer dans ma propre cage
et de ne plus trouver les clés pour en sortir.
Je suis capable de m’envoler avec une aile cassée
et de revenir entière, sans goût à être ici.
J’ai le syndrome de l’imposteur récurrent
et pourtant je me dis que tout est possible.
J’aime naviguer, observant au loin les baleines,
tout en ayant le mal de mer.
J’aime mon pays et je le déteste,
comme je peux le faire avec toi… paradoxe.
Updated on décembre 29, 2024
Le Tour du Val d’Azun : une randonnée de 3 jours dans les Pyrénées
J’avais vécu 5 mois dans le Val d’Azun, du moins à quelques kilomètres de sa frontière dans une ville que l’on pourrait confondre avec celle en bord de mer. Ici pourtant c’était bien les montagnes qui m’entouraient. Il suffisait que j’ouvre les volets de mon studio-chalet pour apercevoir au loin, un sommet caché entre deux nuages. À l’époque, mon voisin était un parapentiste et ma voisine, une fille d’origine allemande qui partait seule à la montagne. J’étais impressionnée et ne pensais pas arriver à faire comme elle un jour, et pourtant.
Rejoindre les Hautes-Pyrénées sans voiture
Mercredi soir sonnait l’heure de fin du travail. Je retrouvais une covoitureuse partant pour Tarbes, qui me déposait à une sortie d’autoroute, afin que je rejoigne mon ancienne colocataire habitant dans le coin. La soirée au coin du feu fut brève, et munie d’un nouveau sifflet et d’une carte IGN, je m’endormais pleine de promesse quant au lendemain.
Mes amis prirent la route pour me déposer au départ de ma randonnée : à Arrens-Marsous.
Pleine de gratitude à ne savoir qu’en faire, mes yeux se parèrent de quelques larmes lorsque nous approchions de Lourdes et de la route nous menant vers les hauts sommets enneigés. Les montagnes se dévoilaient dans la lumière automnale du petit matin, splendides de leur teint lumineux et brutes d’une beauté naturelle, voire hautaine. Je savais alors que tout irait bien, que cette folie d’un lundi soir, après que mon compagnon de rando me lâche, n’en était pas une… et que les angoisses des autres n’étaient plus miennes. Je ressentais au plus profond de moi l’appel sauvage du Val d’Azun et le bonheur de me retrouver seule dans les montagnes, chose qui ne m’était pas arrivée depuis mon aventure sur le GR10.
De Arrens-Marsous à Arbéost
C’est donc juste après la chapelle de Pouey-Laun que je me laisse happer par le GR10, qui monte doucement sur le Chemin de la Reine Hortense. Mon ancienne coloc est partie en me disant d’un sourire que j’avais bien choisi mon point de départ pour le Tour du Val d’Azun !
Je me lance à l’aventure, tout en sachant impunément que ce ne sera pas aussi engagée que les autres randonnées que j’avais pu faire cet été. Et pourtant, une cheville foulée, une rencontre infortune sont si vite arrivées. C’est d’ailleurs à quelques pas du refuge de Gabizos que je ferais ma première rencontre. Un patou sur la route ne se laisse point impressionner par ma confiance soudaine. Il aboie, grogne et s’approche sans vergogne. Je m’arrête pour qu’il puisse me sentir, lui parle doucement et m’éloigne vers mon objectif. Pas de troupeaux en vue pourtant… seul le Pic du Gabizos me dévoilera sa splendeur hivernale, bien plus blanche que la laine de mouton.



Je finis doucement par atteindre le Col de Saucède, après être descendue dans la boue et avoir évité les détails gelés. Dans la montée, j’aperçois un couple partant à l’Ouest à l’assaut de la neige. Je suis contente qu’elle ne vienne pas jusqu’à moi. C’était mon appréhension de fin de saison automnale, où la limite du risque est difficile à cerner. Heureusement le Tour du Val d’Azun ne dépasse pas les 1600 m d’altitude et mi-novembre il fallait quelques dénivelés de plus pour l’atteindre.
Je rejoins la route menant vers le Col du Soulor sur quelques mètres. De la cabane de Bettorte à la cabane du Litor, j’entends siffler au loin. Inquiète j’imagine quelqu’un en détresse qui cherche un peu d’aide pour se sortir d’une impasse. Mais le sifflement est récurrent et plus je m’approche, plus j’ai le sentiment que la saison de la chasse corrèle clairement avec le bruit adjacent. J’avais oublié !! Dans quoi me suis-je embarquée ?


Heureusement le Cirque de Litor me captive et je remets ma rencontre avec les chasseurs à plus tard. Malgré le ciel couvert, les couleurs automnales bercent l’atmosphère d’une rêverie joyeuse. Happée par la nature et l’apaisement qu’elle me procure, je décide de faire ma pause déjeuner, adossée à une pierre, admirant en continu les sommets blancs bordés d’arbres aux couleurs ébène.



Je reprends le chemin goudronné, quittant le GR10 pour un GR de pays qui serpente pour rejoindre l’Ouzoum, que je vais suivre un moment sous une pluie fine et légère. Au moment de m’éloigner vers la droite, Arbéost ne me semble plus très loin et le soleil apparaît me réchauffant le visage. Je rejoins doucement les zones pastorales, où un Mr sur son tracteur me targue d’un grand sourire. Que j’aime la vie ici, les gens du coin, paisibles, montagnards, accueillants. J’ai envie de me poser là sur l’herbe, à faire un bain de vitamine D, mais les chiens me sortent à nouveau de mes songes.


Ici la vie a repris, j’avance donc jusqu’à ma destination finale. À Arbéost il m’était impossible de trouver un logement, la Petite Jeanne étant fermée. C’est à 3 km plus loin que je dormirai, chez un couchsurfeur qui m’attend au croisement du village pour me montrer le chemin que je dois prendre pour rejoindre le quartier Hougarou à Ferrières. Avant le gite d’étape, j’emprunte le chemin descendant, rejoignant à nouveau la rivière Ouzoum et un parcours… dans la boue. Les 3 derniers kilomètres me sont peu agréables, mais il suffira que je pousse la porte de sa maison, pour me souvenir que je suis là au bon endroit.
Un poêle flamboyant, une ambiance chalet… je savais instinctivement que la soirée que j’allais passer avec cet inconnu, me ramènerait inexorablement au cœur de mes voyages d’antan et me ferait oublier l’année anxiogène que nous venions de vivre.
2ème jour sur le Tour du Val d’Azun : d’Arbéost au refuge Haugarou
Je quitte mon hôte après un gâteau au potimarron et quelques châtaignes, pour retrouver l’automne grandeur nature. J’ai préféré prendre la route pour retourner sur Arbéost au lieu de faire un bain de boue ou d’opter pour un raccourci, qui m’aurait fait manquer un spot de rêve pour le déjeuner.
Le chemin monte abrupt dans la forêt et il me faut un brin d’élan pour ne pas glisser. Je ne suis pas d’aussi bonne humeur que la veille et toutes les rancœurs de la semaine dégoulinent à mesure de mon avancée. J’ai toujours pensé que la randonnée était un beau moyen de méditer, d’exorciser les choses qui ne nous permettent pas d’avancer. Sur les chemins en solitaire on n’a pas le choix : il faut continuer coûte que coûte jusqu’à la prochaine habitation.


Le paysage finit par s’ouvrir sur ces merveilleuses montagnes. Tout sourire, je croise une dame assise sur le muret d’un gîte, visage face au soleil et au spectacle. « Ce chien est très gentil », me dit-elle. « Il appartient au fermier en bas ». Nous échangeons sur les splendeurs du coin et je continue ma route en compagnie de ce chien qui ne me quittera plus jusqu’au Col de Soum.
Il connait le chemin. Il serpente à travers la boue et je le suis péniblement à l’affut d’un coin sec. Ce n’est pas évident dans une zone dite marécageuse, mais honnêtement je pensais que ça serait pire en cette mi-saison. Je jongle de touffes d’herbes en touffes d’herbes, croisant le ruisseau de Hougarou jusqu’à atteindre un faux plat. Je me rends compte que les collines que j’aperçois en face ne sont que les crètes sur lesquelles je dois continuer. Il me reste encore quelques dénivelés positifs avant de rejoindre le Lac de Soum, dont mon hôte de la veille ne m’avait vanté que les algues vertes qui semblaient assécher ses profondeurs.


Je décide de prendre de la hauteur et de boucler les 1000 m de D+ de la journée en rejoignant le col au même nom. Il fait froid, le vent s’est levé mais je finis par trouver le spot idéal à côté du chemin montant sur les crêtes. C’est d’ailleurs là que le chien finira par repartir, satisfait de m’avoir accompagné sur la partie la plus éreintante de la journée.

J’en prends plein les yeux ! Les sommets brillent de mile feux, tandis que le lac dénote de ses couleurs flashies. Je profite de la vue et de mon déjeuner, avant de sombrer 20 minutes dans une sieste réconfortante. Oups ! Il est temps de rejoindre le Col de Cantau via la Crète de la Serre, qui offre un redémarrage en douceur de 1532 m à 1543 m. Je me faufile ensuite sur le chemin qui monte vers la gauche, juste après la cabane de Cantau, où je croise deux cavaliers faisant une pause avec leurs chevaux. Et oui, il est tout à fait possible de parcourir le Val d’Azun à cheval en empruntant des chemins alternatifs !
Le chemin est plutôt sympa sur les contreforts de la montagne jusqu’au Col de Berbeillet, puis celui de Bazès. Là, le sentier est barré par des filets de protection et j’aurais pu ne pas le voir ! Je fais glisser mon sac dessous et me contorsionne pour laisser les parents et leurs enfants venus en balade crier plus à l’Est. Je suis le calme de la marche en solitaire, descendant jusqu’au refuge de Hougarou, où je partagerai le dortoir avec une dame faisant le chemin à l’inverse de moi.



Attirée par le poêle de la salle principale, j’y passerai ma soirée feuilletant les magazines pyrénéens me ramenant à mon aventure espagnole, des Encantats à Ordesa. Je retrouverai la dame et une famille de 4 convives, partageant notre diner fait maison autour d’échanges de randonneurs. Du Vercors au Vignemale, en passant par le Chemin de St-Jacques, il nous aurait fallu plus d’une soirée pour faire le tour de nos aventures montagnardes. Requinquée par un brin de compagnie, je m’endors paisiblement jusqu’aux ronflements intempestifs de ma voisine.
Dernière étape du Val d’Azun : du refuge Haugarou à Aras-en-Lavedan
C’est déjà la dernière étape de mon aventure. Avant que vous vous mépreniez, il faut savoir que le Tour du Val d’Azun se fait normalement sur 5 jours continuant jusqu’au Lac d’Estaing. Le temps me manquait et finalement je semblais avoir opté pour la partie la plus ouverte sur les paysages alentours. Du moins c’est ce que je croyais jusqu’à ce que le brouillard s’en mêle.
Je quitte le refuge par un sentier dans la forêt, avant de suivre une déviation sur la route pour retrouver le Tour du Val d’Azun. Je me réengage sous les arbres jusqu’au Col de Couret. Mais c’était sans compter sur la compagnie des chasseurs !
Randonner en période de chasse
J’entends les chiens s’agiter, munis de leur grelots autour du cou, leur maître sifflant et les appelant doucement pour qu’ils reviennent au pas. Les chiens me voient et j’espère plus que tout que ces hommes aux bonnets orange finiront par me dire bonjour. Le premier me fait un signe de la main, me rassurant pour le reste de la balade. Du moins c’est ce que je pensais… le chemin serpente dans la forêt. Je passe une nouvelle voiture et je continue tranquillement sans bruit alentour. C’était sans compter le coup de feu qui me fit faire un bon de 3 mètres !
Pestant aussi fort que je le pouvais, je finis par prendre mon sifflet pour signaler ma présence, espérant que ces joyeux lurons n’auront pas trop abusé sur le pinard dès les premières lueurs du jour. Oui, on les voit sur les collines ariégeoises, tellement torchés qu’ils ne marchent plus droit. Bref… vous avez surement deviné ma joie à l’idée de me balader en compagnie de tel personnage. Heureusement le chemin s’éloigne rapidement et je ne croiserai plus personne aux couleurs fluo orangé. À la vue des trois biches dont on m’avait conté la rencontre la veille, je finis par ne plus être aux aguets rejoignant finalement le Col du Couret.


La fin d’une étape
C’est ici que j’aurais dû monter sur les arrêtes m’offrant une vue à 360° sur le Val d’Azun. Et bien non ! La météo en aura décidé autrement et la journée ensoleillée de la veille a laissé place aux nuages volants des montagnes. Le brouillard me contraint à la sécurité. Je rejoindrai le Col du Liar via le chemin adjacent, longeant la forêt d’Aragnat. Du col, j’entamerai la descente jusqu’à Arras-en-Lavedan par pistes, chemins et sentiers.
Je rejoindrai Sophie qui tient la chambre d’hôtes LeGentilhomme à la douceur et gentillesse du coin. Puis je retrouverai mon nouvel ami d’Arbéost au Café-librairie du village pour un petit repas au chaud. J’y croiserai un ancien guide à la retraite, échangeant sur cette boîte qui, il y a plus de 12 ans, avait fini par me donner ma première chance dans un secteur que je plaçais encore sur un piédestal. J’en ai parcouru du chemin depuis, de ma première randonnée en solitaire en Nouvelle-Zélande, à mon premier trek en Tasmanie et les quelques expériences pyrénéennes que j’ai vécu depuis.
Fin d’un Tour du Val d’Azun
Il est temps pour moi de quitter ce coin de paradis, cette vallée paisible et heureuse qui semble encore dormir dans une écume joyeuse. Je lève le pouce au bord de la route, me laissant amener jusqu’à Argelès-Gazost par une femme revenue dans la région, pour continuer à profiter de son indépendance tout en étant jeune maman. Sur le rond-point partant pour Lourdes, j’offrirai mon plus beau sourire sous une pluie fine espérant que quelqu’un voudra bien me prendre jusqu’à la gare, où mon train m’attend. Finalement, un passionné d’oiseaux s’arrêtera me ramenant jusqu’à Tarbes, profitant de quelques minutes en plus pour échanger sur nos passions communes et lointaines. Je sourirai intérieurement à cette idée de rencontres éphémères qui m’avaient tant manqué. Ces connexions que l’on arrive à créer avec de parfaits inconnus, redonnant du baume au cœur dans un monde coupé des autres depuis un certain temps.
Dans le Val d’Azun, je me suis remise à rêver. Je n’ osais plus depuis mon départ de Sao-Tomé. Trois jours de marche et une gratitude immense envers ceux qui avaient permis cette aventure : mon ami qui m’avait laissé tomber, mon ancienne colocataire au cœur d’or, ce couchsurfer sans qui je ne serais parti, ce chien devenu compagnon de chemin et cette nature bienveillante qui redonne confiance. D’une fleur fanée, vidée par l’atmosphère entêtante d’un pays meurtri, j’ai fini par éclore et par me demander quand est-ce que je reviendrai. Satisfaite, la sensation d’avoir bouclé la boucle me laisse tout de même avec une pointe de tristesse : celle de la nostalgie du Val d’Azun, cet eden pyrénéen où il ferait bon vivre.
Je vous aurais prévenu… quand on fait le Tour du Val d’Azun, on ne repart jamais indifférent !
Updated on décembre 29, 2024
Le Pic du Néouvielle et ses lacs: randonner en Hautes-Pyrénées
C’est l’histoire d’un rêve. Le rêve d’une petite fille qui se voit aventurière, assise sur un traineau, voguant dans les immensités blanches du Canada. Il y a des rêves que l’on met de côté, pour mieux les côtoyer à l’âge adulte et pourtant à l’aube de leur réalisation on doute encore.
Le temps d’un bivouac au Lac d’Aubert
Il est 18h, j’ai rejoint Toulouse pour rejoindre les 3 gars avec qui je suis censée partir vers le Néouvielle. Un moment déjà que l’on me fait miroiter ses beautés aux milles lacs. La route est longue avec les embouteillages toulousains et les départs en vacances. On dirait que tout le monde a découvert les joies de la montagne cette année. La météo s’annonce mauvaise dans les Hautes-Pyrénées, mais une fenêtre de quelques heures devrait nous offrir assez de temps pour l’ascension du Pic.
Arrivés au lac d’Aubert à 2150 m, nous nous installons à l’aire de bivouac juste derrière le barrage. Il n’ y a pas foule au vu du temps annoncé, et on profite de notre première soirée pour prendre des forces en compagnie des moustiques et réaliser ce qui nous attends…. du moins pour moi. Je suis la seule à ne jamais avoir fait l’ascension du Néouvielle et l’idée de traverser des névés, fréquents à cette période de l’année ne m’enchante pas (nous sommes début Juillet). Le seul 3000 que je me suis octroyée, était dans les Alpes au Mont-Thabor. Le Mont Perdu, dans les Pyrénées Espagnoles fut restreint par la neige de la vielle, le Néouvielle sera donc mon premier 3000 pyrénéen.
École de neige et ascension du Néouvielle
Comment tomber d’un névé
Le lendemain, notre guide du jour semble galérer. La première montée au détour du barrage l’emmène à cracher ses poumons. Je ne suis pas encore en confiance. Je sais qu’il me faut toujours un peu de temps pour trouver mon rythme, et je me suis souvent répétée que la première demi-heure était la plus dure. Laissons-lui le bénéfice du doute. Le réveil à 6h du mat fut corsé. Le programme du jour est de trouver un névé, assez sécuritaire pour que l’on puisse s’y laisser glisser.
La neige n’est plus… où du moins c’est ce que l’on croit à la vue de nos 400 m de dénivelé monté. Notre guide, ancien personnel du CAF, finit par trouver la forme et grimpe vaillamment à l’affût d’un terrain de jeu. Je ne suis clairement pas enthousiaste à l’idée de jouer au toboggan, ayant peur de tout ce qui glisse. Partir au ski ne fut jamais un délice pour ma part, n’ayant pu profiter des compétences de mon père, petite. Pourtant il va falloir que j’y passe. Le névé est trouvé ! Glissant, finissant en pente douce. Il est temps de se lancer.
Les gars se jettent de tout leur corps en haut de ce nevé, qui finit par naturellement ralentir leur chute. Je vois bien que ce n’est pas dangereux et pourtant tout mon corps bloque face à l’idée de se lancer pour le plaisir. Comment peut-on y trouver une once de positif lorsque l’on est tétanisé par la peur ? Je cache tellement bien mes émotions que notre guide du jour nous raconte les pires anecdotes qui arrivent aux personnes qui tombent d’un névé. « C’est mieux d’en avoir conscience » nous dit-il. Je rigole nerveusement. « Allez Lucie c’est à toi ». « Non merci, ça ira ». Regard interrogateur, notre compère finit par comprendre que c’est la peur qui me tétanise. Moi, j’ai surtout honte de ne pas être à la hauteur des 2 autres. Je n’ai aucune envie de faire perdre leur temps à ceux qui m’accompagnent et oublient complètement pourquoi je suis là. Celui qui n’arrivait pas à avancer au début de la journée, finit par trouver les mots. « C’est normal d’avoir peur, cela signifie que tu as la tête sur les épaules ». Je monte doucement le névé et m’assoie telle une enfant qui essaie le toboggan tétanisée pour la première fois. Je descends, me sentant ridicule d’avoir eu peur de ça. Je remonte le névé un peu plus haut cette fois, et il est temps de me faire tomber dans la neige pour apprendre à me retourner telle une grenouille agrippée à la paroi. « C’est bien ! » m’encouragent les gars. On finit par passer au piolet, puis à se faire tomber encordés. Le terrain de jeu devient de moins en moins pentu à mesure que nous avançons dans notre apprentissage.
Il est déjà 12h, nous sommes exténués tels des gosses qui auraient trop joués dans la neige. L’orage est prévu à 15h. Il nous reste seulement 500 mètres de dénivelé à faire. Pas de nuages gris à l’horizon, annonciateur de mauvais temps: l’ascension sera pour aujourd’hui. Pique-nique sur les pierres chauffées par le soleil au dessus de notre névé de jeu, puis petite sieste avant de continuer.
Randonner jusqu’au Pic du Néouvielle
En juillet, la neige est encore là, facilitant notre avancée jusqu’au pic. En effet, elle recouvre goulument le pierrier géant que l’on rencontre dès le mois d’août. Je me retrouve donc devant le névé le plus grand de ma vie. Mais la leçon du matin permet de me laisser avancer confiante. Parfois la neige n’est plus et il faut jouer l’équilibriste sur les gros cailloux glissants. Mais j’avance consciencieusement et la pente me semble plus facile que ce que j’avais appréhendé.
Malgré le levé matinal et les fausses glissades, j’ai assez d’énergie pour espérer atteindre les 3091m du Néouvielle. Nous avançons sans crampons, la neige étant trop molle, le piolet à la main, la tige longue plantée dans la neige. Le mien pèse une tonne et me semble plus lourd qu’un sac de 20kg sur le dos. Je suis reconnaissante que l’on ait pu me le prêter pour le week-end. Je me dis qu’un piolet de ce genre me permettrait de tenir debout sur une planche, les bras musclés, la prochaine fois que je penserais m’aventurer à surfer en Namibie. On ne manque pas d’humour à la montagne !
Je me recentre sur mon objectif et en profite pour prendre quelques photos. Notre guide a l’air stressé de mes aventures matinales et propose de m’encorder sur certains passages. Je ne suis pas de cet avis, mais me laisse faire pour le rassurer. Après tout c’est lui qui a le plus d’expérience, mais la corde qui s’emmêle dans mes jambes ne serait-elle pas de trop ?
Heureusement nous atteignons la fin du névé, qui nous laisse face à un amas de grosses pierres à grimper. Nous les franchissons doucement, en compagnie de deux jeunes randonneurs. Une fois arrivés au sommet, on nous propose de fêter l’arrivée à coup de « pompotte magique ». Nous refusons gentiment et profitons de la vue bercée par les nuages. L’ orage prévu semble encore loin, mais nous ne tardons pas à entamer la descente que, bien sûr, j’appréhende.
Le piolet arnaché sur mon sac cette fois, c’est les deux pieds joints que je descendrais le névé, jusqu’à retrouver notre base matinale. Il ne restera plus que les 400 mètres de dénivelé négatif à franchir, avant de replanter la tente, sur notre zone de bivouac.
Le Néouvielle, de lacs en lacs
Nous nous levons un brin plus tard que la veille. Nous avons passé la nuit sous l’orage, mais nos tentes ont tenu le coup et fini par sécher. Un grand soleil nous accueille matinal, tandis que les moustiques prennent plaisir à nous dévorer. Le petit-déjeuner s’avale vite et nous optons pour une randonnée autour des lacs. Je suis ravie ! Moi qui pensait que nous aurions seulement le temps de l’ascension, j’espérais apercevoir les eaux tant citées du coin.
Du parking où nous avons laissé notre matériel de bivouac, nous contournons le lac d’Aumar, puis prenons le chemin vers le col au même nom. Je carbure de bon matin. Si je m’arrête dans la montée, je ne suis pas sûre de pouvoir repartir. Arrivés au col, nous croisons une famille avec de jeunes enfants, qui viennent de passer la nuit dans les contrées peu exploitées du Néouvielle. Pour rappel, le bivouac est interdit dans la réserve naturelle et seulement toléré sur l’aire réservée.
Du col, nous repérons le lac vers lequel nous souhaitons nous diriger: le lac supérieur. Le lieu est splendide et nous offre des vues sur le sommet de la vieille et le chemin parcouru. On ne m’avait point menti sur le Néouvielle. La zone semble moins exploitée que les gros lacs près du parcours. Nous avons trouvé un terrain de jeu où nous sommes seuls. Nous nous posons le temps d’un pique-nique et d’une sieste, avant de rejoindre le lac de l’île et celui de l’Ours, où nous finissons par nous égarer hors sentier.
Exténuée, l’énervement finit par prendre le dessus après une journée conviviale parmi les splendeurs pyrénéennes. Mon intuition me chuchote de ne pas passer par là, et pourtant le gps gagnera la manche des décisions. Comment leur expliquer cet outil formidable qui m’a maintes fois accompagné en voyage, basé sur aucune technologie, ni recherche scientifique ? Nous faisons demi-tour et la fatigue l’emportera jusqu’à notre retour sur Toulouse, au camp de base.
Un chapitre s’est clos, mais m’amène 2 mois après à reprendre la route pour un sommet d’une même envergure. Souvenez-vous: l’expérience se déguste, humble face aux montagnes.

















