Pic de Cambalès et boucle des lacs : deux jours dans les Hautes-Pyrénées

Cet hiver, en partant pour une balade jusqu’au refuge Wallon avec les filles de l’association Pyrelles, la gérante me parle des lacs qui se trouvent en amont. Je ne les connais pas. Elle me certifie qu’ils sont splendides et c’est toujours via ce genre d’échange que je chéris, qu’une graine se plante. Parfois certaines ne prennent pas racines, mais d’autres passent l’hiver au chaud avant de grandir l’été venu. Me voilà, en train de planifier un tour des lacs (et pic) de Cambalès, de Nère, du Pourtet et de l’Embarrat.

J’embarque donc Mathieu, un acolyte blogueur dans cette aventure. Du moins, c’est plutôt lui qui m’emmène vu que je n’ai plus de voiture. Il nous reste deux places à l’arrière… vous venez ?

Du pont d’Espagne aux lacs de Cambalès

Après s’être garé sur le parking toujours aussi immense du pont d’Espagne, je montre à Mathieu la cascade si photogénique, qui a amené la commune à mettre en place un tel dispositif d’accueil. L’affluence touristique du coin n’est pas encore à son apogée et nous partons sereinement vers le refuge Wallon qui a ré-ouvert l’hiver dernier.

On s’engage sur ce chemin que je connais déjà. Les pierres arrivent vite, mais c’est d’un pas motivé que nous avançons jusqu’à la pause midi. Je retrouve les tables familières du refuge pour engager le postérieur dessus. J’attends Mathieu qui s’est surement arrêté pour prendre une nouvelle photo. C’est toujours sympa de remarcher sur un chemin, accompagné d’un novice pour le regarder avec des yeux nouveaux.

On mange donc notre déjeuner, accompagné d’une crêpe sucré et bien huileuse, avant de demander quelques idées de sommets à l’un des gardiens :

– On hésitait à partir sur la Grande Fache. Vous auriez des recommandations ? demanda Mathieu.
Perplexe, j’assure le gardien que je ne suis pas partie pour gravir un 3000, encore moins la Grande Fache.
– Vous avez le Pic de Cambalès qui est pas mal. Il suffit de passer par le Col d’Aragon.
Je demande au gardien de nous montrer le chemin, m’assure du terrain, de la présence de névés et du temps approximatif.
– Vous pouvez contourner les névés. Il vous faut compter 1h30 au départ des lacs de Cambalès, nous assure-t-il.

Nous voilà (presque) rassurés ! Nous prenons donc le chemin qui grimpe derrière la chapelle pour rejoindre les lacs, où je souhaitais poser la tente pour le bivouac du soir. Il est 15h lorsque nous arrivons et la pluie fine nous offre ses gouttes qui transpercent. Après avoir partagé un morceau de gâteau basque, (une histoire de GR10 encore) et un thé chaud, chacun finit par vaquer à ses occupations pour nous retrouver au repas du soir en bord de lac de Cambalès.

Ascension imprévue du pic de Cambalès

Au petit matin, on se réveille la tête dans le brouillard. Je demande à M. s’il est toujours motivé pour l’ascension du pic de Cambalès. Bizarrement depuis la veille je ne le sens pas.

M. me répond que la visibilité n’est pas si mauvaise dans le brouillard et que l’on risque de passer au dessus de la mer de nuage. Vu que je suis abonnée à une vue brouillée depuis mes dernières randonnées, je ne suis pas très optimiste pour la photo à 360° au sommet.

Nous partons tant bien que mal, de lacs à en lacs jusqu’à trouver les cairns nous menant vers le col d’Aragon. Tout à coup à notre gauche, le brouillard se dégage pour nous laisser admirer le lac d’Opale qui porte bien son nom. L’ eau d’un bleu vif presque turquoise me prend aux tripes. La magie des montagnes, de la météo changeante, des courts instants de vie me saisit… c’est dans ces moments-là que j’apprécie le plus le moment présent. Ces petits rappels au détour d’un sentier forcent mon désir de randonnées.

Le brouillard cependant nous rappelle à lui. Nous continuons donc avec ferveur notre recherche de cairns. Le sentier grimpe et je suis contente d’avoir laissé mon sac derrière un gros rocher. C’est que la tente, le sac de couchage et le réchaud finissent toujours par peser sur mon dos. J’ai eu la bonne idée de me munir de victuailles pour l’ascension : une doudoune, une gourde, quelques galettes de riz recouvertes de chocolat… fondant !

Je regrette vite mes lunettes de soleil et la crème solaire laissées plus bas lorsque nous enchainons les montées de grosses pierres. Du pierrier en veux-tu en voilà ! Mais pour le moment, les pierres sont géantes et ne bougent pas.

Je garde l’œil sur les lacs en contrebas. Notre avancée me semblent longue, très longues par rapport à ce que nous avait promis le gardien du refuge. A la rencontre de notre premier névé, M. décide de continuer sur les crêtes, tandis que je cherche à suivre les cairns, en traversant pas peu fière la neige compactée sur les gros rochers. Le brouillard a bien fini par disparaître, laissant place à un soleil rasant. La neige fondante absorbe le choc de mes pieds à la surface. Nous n’aurons pas besoin de crampons.

Mais cette histoire ne me rassure pas. Nous sommes encore loin du col d’Aragon et voilà pourtant l’heure et demi qui passe. J’avance désespérée de ne pas avoir protégé ma peau avant de laisser mon sac en contrebas. Quelle erreur de débutante !

M. finit par me rejoindre et c’est à ce moment là que nous perdons les cairns. Confiante, je lui propose de passer par le couloir de droite qui semble accessible via un gros névé. M. est plutôt d’accord avec l’idée. Pourtant une fois les pieds dans les mini-cailloux dégoulinants, on aura tant de fois envie de faire demi-tour. Deuxième erreur de débutant : toujours retourner sur ses pattes lorsqu’on perd la trace ! Engagés dans le couloir de la mort, on se rend à l’évidence : on ne sera pas en capacité de redescendre. Nous avançons tant bien que mal et je me prends à chanter « Hallelujah » de Léonard Cohen pour faire passer la pommade.

On finit par rejoindre les cairns qui nous faisaient passer par la gauche et le col d’Aragon s’ouvre enfin. On explore le côté espagnol, jusqu’à découvrir surprise un bouquetin. Je continue à l’observer tandis que M. va chercher de l’eau au lac en contre-bas. Puis on décide de monter jusqu’au Pic.

Du Pic de Cambalès aux lacs de Cambalès

A quelques encablures du col d’Aragon, une ouverture s’ouvre sur le vide. C’est magnifique. M. n’ose pas trop s’approcher et finit par m’annoncer qu’il ne montera pas le sommet.

Après tous les rochers parcourus je trouve cela dommage de m’arrêter ici. Alors je grimpe un peu plus haut pour voir où le sentier mène. Je monte, je monte sans trop me soucier de la descente et je finis par apercevoir le sommet. Il n’est pas si loin. Je tourne la tête pour faire signe à M. qui écrit sur son carnet, posé juste avant l’ouverture. Soudain, je me rends compte de la descente qui m’attend. Je n’avais pas réalisé qu’elle serait raide et les frayeurs du matin me découragent rapidement. Regardant ma carte, je réalise que je suis seulement à 100 mètres de dénivelé du sommet.

Il ne me reste plus grand chose et pourtant je redescends. A la base, j’étais venue pour un bivouac tranquille autour des lacs. La faim me tiraille. Les quelques galettes de riz n’auront pas suffit à m’insuffler l’énergie nécessaire à cette randonnée annoncée de 3h maximum qui se transformera en 7h pause comprise ! Je rejoins alors M. un brin dépitée mais bien décidée à redescendre cet amas de pierre qui commence à me gonfler.

Il fait chaud sur ces gros cailloux. D’un pas svelte, mon corps attaque la descente et nous faisons bien attention à suivre les cairns cette fois. Le couloir se présentant sur notre droite est beaucoup plus simple que ce par quoi nous sommes montés. Nous observons assez ébahis le chemin chaotique que nous avons emprunté à l’aller. Je peste contre ce gardien de refuge qui nous a conseillé sans même nous demander notre niveau. J’aurais du écouter mon intuition… celle qui me disait que le Soum de Bassia n’était pas si mal pour un dimanche. Je préfère prévoir et regarder les topos en amont car je sais que la montagne a toujours son lot de surprise.

Le manque d’eau finit par se faire sentir. Alors que je chauffe de la tête au pied, M. remplit la gourde de la neige du névé. J’ai peur de prendre un coup de chaud. J’attrape désespéramment la neige pour me l’étaler sur le derrière du cou, les tempes et les poignets et caler sous ma casquette un petit tas rafraichissant. M. est rouge écrevisse et je ne parie pas cher pour ma propre peau.

Nous descendons et finissons par apercevoir les lacs, cherchant nos sacs à récupérer.

Après avoir loupé nos sacs de peu, nous remontons et dégustons notre déjeuner à 17h. Il était temps ! Je relâche la pression et toute la fatigue et la chaleur accumulée sur la journée se dessine dans ma tête. Restons-nous sur notre itinéraire ou descendons-nous au refuge pour se remettre les idées en place à coup de génépi ?

Je résiste à l’appel de la boisson sucrée alcoolisée pour embarquer M. jusqu’au lac de Nère. Grognon sur la descente jusqu’à la bifurcation, je n’ai pas su lâcher prise sur l’itinéraire malgré la fatigue… Je serre les dents dans la montée, crevée. 45 min plus tard, on aperçoit le lac parmi la brume qui nous a rejoint et nous continuons jusqu’au Pourtet. De ce dernier, on prolonge la randonnée alors que le soleil ne va pas tarder à se coucher. 1h30 plus tard nous voilà au lac de l’Embarrat inférieur à chercher désespéramment un spot de bivouac.

Le lieu est trempé. Nos tentes sont mouillées depuis le matin, et je culpabilise légèrement d’avoir embarqué M. jusqu’ici. Après un diner plus sympa que ma prise de tête, nous nous couchons exténué par une journée bien chaude et un nouveau terrain de jeu pour M.

Des lacs de l’Embarrat au pont d’Espagne

Notre départ est prévu à 6h30. Réveil à 5h45 pour ma part. Je traine un peu dans mon sac de couchage avant de commencer ma routine matinale de bivouac : en sortir, le plier, dégonfler le matelas, sortir de la tente et la ranger. Tout est prêt et je prends un petit-déjeuner lorsque M. sort de la sienne.

Le spot de bivouac humide du soir se révèle être parfait ! Au petit matin, plus de brouillard ! La vue est splendide et les rayons du soleil chatouillent les montagnes au dessus du lac. C’est à 6h45 que nous partons pour rejoindre le pont d’Espagne. 2h45 avait été annoncé au départ du lac de Pourtet et j’avais peur de ne pas être à l’heure pour le travail.

Une descente de 600 m de dénivelé nous attend. Les pieds sont moins sûrs que la veille et jonglent pourtant avec les rochers. Il y en a partout… jusqu’au bout ! C’est là qu’on sait que l’on randonne dans les Hautes-Pyrénées. Je rigole comme une enfant et j’avance patiemment, heureuse d’avoir accepté cette deuxième nuit de bivouac.

Nous rejoignons le chemin nous menant au Pont d’Espagne, plat mais long. La lumière matinale rase les plateaux remplis de chevaux. C’est beau et je ne regrette pas de m’être levée si tôt.

Nous reprenons la route vers le Val d’Azun. Après un arrêt à Cauterets pour enfin tester la tourte aux myrtilles de Chez Gillou, je suis prête à me mettre devant mon ordinateur pour entamer la semaine de travail qui m’attend. M, lui, reprend la route vers une autre vallée pyrénéenne. Une aventure d’un week-end que je vous recommande chaudement (mais avec beaucoup d’eau et de crème solaire !).

Dormir au sommet du Cabaliros

Le Cabaliros, c’est un sommet mythique du Val d’Azun. Dès que j’ai posé les pieds dans le coin, cet objectif de randonnée est revenu plusieurs fois à mes oreilles. Alors quand à travers une conversation, on m’a proposé d’y dormir au sommet, la graine fut plantée et je n’ai pas pu résister à l’envie de ressortir l’idée.

Le Cabaliros au départ de Sireix

On grimpe la piste qui part de Sireix. Les panneaux indiquent le Cabaliros. Une fois garé vers 1486 m, on bifurque à droite et non à gauche sur le GR habituel qui passe par la Tucoy. En effet, la neige est présente en ce début de printemps et il n’est pas recommandé de s’engager sur le parcours estival pour cause de dévers important. Après quelques mètres sans neige, engagés vers la cabane de Banciole, on finit rapidement par chausser les raquettes. Le Cabaliros n’est pas encore en vue, mais la grimpette s’annonce blanche, à mon plus grand bonheur.

Voilà quelques semaines déjà que je n’avais pas chaussé les raquettes. Je pensais que l’hiver avait tiré sa révérence et après quelques semaines chaudes, le froid est revenu pour un dernier clin d’œil. Je n’avais encore jamais bivouaqué en pleine neige et le Cabaliros apparaissait comme un objectif sympathique, surtout avec la vue à 360° qu’il promettait.

Après la cabane de Banciole, nous nous orientons vers le Cap de la Lillade. Je suis mon guide du jour qui est venu maintes fois par ici. On rejoint le ruisseau de Hourques que l’on devine à travers le creux qu’il dessine. Les rochers qui se dégagent de la neige encombrent mes raquettes, mais j’avance doucement sur le devers flagrant. Heureusement ce passage chaotique est de courte durée et on rejoint très vite les flancs plus lisse qui se dégagent jusqu’au Clot de la Bassette. On aperçoit le col de Contente sur la droite avant de prendre à gauche vers notre objectif final.

Le Pic du Cabaliros a joué tout l’après-midi avec les nuages et lorsque nous l’atteignons, la vue n’est pas entièrement dégagée. Je me délecte des noms des sommets qui nous entourent sur la table d’orientation et ouvre l’oeil comme une enfant. Parfois le fond blanc disparait pour laisser place à l’arrière plan, mais on est loin de l’ouverture grandiose à 360°.

Un bivouac sur belvédère

La neige parsème goulument le sol sur lequel nous nous trouvons. On commence à creuser pour caler la tente, mais finalement on se dit que le gel matinal risque de bien s’accrocher à la paroi et qu’il sera plus dur de s’en extirper. On recouvre donc les bords de la tente avec de la neige tassée et je me glisse rapidement à l’intérieur pour me changer.

C’est qu’il fait déjà froid. Après être parti vers 14h, l’arrivée vers 18h s’est rafraichie et j’appréhende un peu le reste de la soirée. La vue est maintenant complètement fermée par le brouillard épais qui s’est engouffré dès notre arrivée. Je savais que la météo ne serait pas optimale. Mais après des jours de pluie, je voulais saisir la seule éclaircie de la semaine. J’espérais que le beau temps se mêle à une nuit étoilée. Le nez sorti plusieurs fois à travers l’ouverture de la tente, je profite de quelques fenêtres à travers les nuages épais.

Je ressors plusieurs fois affrontant le froid environnant, espérant que le brouillard se transforme en grand ciel dégagé. Il faut que je me rende à l’évidence, ce ne sera pas pour la soirée.

Emmitouflés dans nos sacs de couchage, on se goinfre d’un cake aux olives, d’une soupe chaude et on fait descendre le tout à coup de whisky ou patcharan. Les souvenirs se laissent embrouillés par le brouillard et les questions qui se sont posées quelques jours en arrière… tranchantes. Les nuages ne suffisent pas à refermer la plaie.

Au petit matin, le brouillard est encore plus épais. Pas de coucher, ni lever de soleil pour se rassurer. Alors je me laisserai guider à l’aveugle par mon guide muni de sa carte et de sa boussole. La confiance est encore là. Nous redescendrons sur les flancs du Cabaliros, droit devant nous. Nous rejoindrons ensuite les fougères et la piste nous ramenant à Sireix.

Randonnée dans les Cinque Terre, une itinérance italienne

Randonnée dans les Cinque Terre : une itinérance italienne

De l’Italie, je n’avais que des souvenirs lointains d’un séjour de lycée. On était loin d’une idée de randonnée dans les Cinque terre. On était allé de Rome à Florence avec notre professeur de latin préférée, et j’avais gardé un souvenir presque immaculée de la vue sur le Duomo depuis le Campanile de Giotto. Depuis cette ode à la « dolce vita » a tenu son ancrage, mais c’est ce restaurant à Ventimille, alors que je vivais sur la Côte d’Azur, qui marqua mes papilles. Des pâtes fondantes aux tiramisu crémeux à la fraise, je m’étais dit que je prendrais un jour le train jusqu’aux célèbres photogéniques Cinque Terre.

Aller aux Cinque Terre sans avion

À l’époque, j’ai eu la flemme. Peut-être qu’il y a quatorze ans, les informations n’étaient pas ce qu’elles étaient aujourd’hui sur Internet et mon homonyme, Lucie Tournebize, n’avait pas encore sorti son livre « L’Italie en train« . Alors que j’étais domiciliée entre Cannes et Nice, l’aventure aurait pu être pu paisible que le trajet que je m’apprêtais finalement à faire en bus. Le train semble encore aujourd’hui réservé à une élite, du moins quant on a passé l’âge d’avoir en France la carte 12-25. C’est donc au départ de Toulouse (après avoir fait fumer ma voiture sur l’autoroute depuis les Pyrénées), que je m’apprête à passer la nuit dans le bus jusqu’à Grenoble. De là, ça sera 4h à dormir sur un siège de gare avant ma correspondance me menant jusqu’à La Spezia.

De la Spezia à Porto Venere

Après avoir passé la nuit et profité d’un petit-déjeuner sur la terrasse de notre airbnb à l’ombre d’un citronnier, nous partons de La Spezia, rue Garibaldi. Nous montons dans le bus qui vient tout juste d’arriver, en direction de Porto Venere. Chaque passager a un ticket en main et nous demandons à la conductrice comment ça marche. Après nous avoir expliqué que les billets s’achetaient dans les tabacs, elle nous propose de monter et de payer à Porto Venere. C’était sans compter sur les deux contrôleurs à l’arrêt suivant qui essaieront vaillamment de nous vendre un pass journée pour deux à 35€. On négocie gentiment, détaillant l’accord implicite que nous avions avec la conductrice, avant de nous acquitter d’une dizaine d’euros, les convaincant de nous laisser tranquille.

Résultat des courses : achetez vos billets bien en amont et si par mégarde vous tombez sur de gentils contrôleurs, prenez votre temps. On aura servi d’animation dans le bus.

Arrivée au cœur de Porto Venere, la météo est au beau fixe. Nous montons à l’église de San Pietro pour admirer la vue. Après une focaccia délicieuse et un café d’orzo (une belle alternative au décaféiné), nous tentons de faire un tour des îles Palmaria, Tino et Tinetto mais celui de 15h est annulé. Une semaine avant Pâques, la saison touristique ne semble pas avoir été encore activée. Nous profitons donc du calme de Portovenere pour jouer aux cartes, admirer l’eau calme et récupérer de nos trajets individuels de France et d’Allemagne. Quelques emplettes plus tard, nous reprendrons le bus en sens inverse pour un hôtel dans un petit village.

Bon plan : pour ceux et celles qui n’auraient pas peur des ronfleurs, le « Rifugio Muzzerone » semble une belle halte sur le chemin menant à Riommaggiore. Comptez une demi-heure de marche grimpante depuis Porto Venere

Les Cinque Terre en randonnée : de Porto Venere à Riommaggiore

Après avoir attendu le bus 30min sur la petite placette de la veille, nous retournons sur Porto Venere pour commencer notre marche. Le ciel est couvert mais le soleil passe à travers les nuages. La montée est rude alors le pas lent, nous avançons vers une vue sculpturale sur l’église de San Pietro. Le sentier alterne passage à couvert sous les arbres et petite enclave sur le paysage.

Vers 12h30, nous débouchons sur une petite placette jonchée de chaise et d’une caravane verte servant du café. Il est l’heure de se poser devant un point de vue sur l’océan, dégustant notre baguette achetée la veille. Trempée dans un pesto artisanal, toutes les saveurs italiennes se réveillent. Le temps change et alors que nous reprenons le chemin vers Riomaggiore, la pluie se met à tomber. Fine au premier abord, on avance imperturbable sur le sentier parsemé de pierres pas encore glissantes.

Le GR change et nous laisse avancer de petits bonheurs en arrêts photo. Malgré la brume, on aperçoit les terasses de vignes, les longeant jusqu’à découvrir le premier village des Cinque Terre au loin. Les couleurs sont aveuglées par la pluie et finalement vers 18h, nous sommes bien contentes de nous mettre à l’abri.

De Riomaggiore à Corniglia, en passant par Manarola et Volastra

Nous prenons le temps de nous promener dans les rues de Riomaggiore, la pluie ayant laissé place à une éclaircie matinale. La vue en hauteur sur le village nous dévoile les couleurs attendues des Cinque Terre.

Nous laissons Riomaggiore derrière nous, pour nous engager dans les ruelles montantes et les escaliers longeant les cultures en terrasse. La vue s’ouvre alors sur la mer bleu turquoise à flanc de falaise. Nous rejoignons Manarola pour le midi, accompagnées par les cloches de l’église.

Après un déjeuner cheveux au vent et un tour du village, nous repartons vers les vignes. Ici les ceps s’étendent en pergola, laissant les vignes basses à une époque ancienne.

Le soleil nous encourage sur la montée avant de nous laisser profiter d’un sentier plus plat serpentant parmi les champs d’oliviers. La mer n’est jamais très loin jusqu’à Corniglia.

Arrivées à destination, nous profitions d’une halte sur la place au soleil, agrémentée d’une glace rafraichissante au citron – basilic. Un délice ! Nous parcourons Corniglia de long en large, nous perdant dans escaliers montants et descendants, pour trouver notre logement du soir.

De Corniglia à Monterosso, en passant par Vernazza

Nous quittons Corniglia avec un bout de Panettone dans le ventre, nous acquittant des frais du sentier bleu en ligne. Après notre expérience auprès des contrôleurs de bus, nous voulons être en règle avant d’emprunter le chemin qui longe la mer du regard, au lieu de flirter avec l’intérieur des terres. Le parcours semble plus fréquenté qu’à notre habitude, jusqu’à Vernazza. Ici, on a quitté les vignes et les plantations en terrasse pour profiter d’une route presque pavée avec vue sur la mer.

Vernazza nous accueille avec la pluie et c’est sous une arche que nous dégustons notre tapenade achetée le matin même. Après un café d’orzo, on s’attèle à nouveau sur le chemin censé nous accompagner jusqu’à Monterosso. La pluie s’accentue. Nos pieds accélèrent la cadence, jonglant entre les marches et les pierres mouillées et glissantes. Arrivées complètement trempées, Monterosso nous apparaîtra trop humide pour que l’on veuille s’y attarder. Nous prendrons donc le train pour Levanto (5 min = 5 euros) avant une bonne douche chaude et la pizza du soir.

Quitter les Cinque Terre, pour une journée à Portofino

Nous avons quitté complètement les Cinque Terre, mais nous voulons profiter de notre dernière journée de voyage. Alors ce matin, on se lève tôt pour chopper le train de 8h11 nous menant jusqu’à Santa Marguerita, une jolie ville toujours en Ligurie. Le train a un peu de retard, alors nous avalons notre petit-déjeuner à la gare. Trente minutes plus tard, le bus pour Portofino s’attrape au pied de la gare. Pas de soucis de ticket cette fois-ci, il suffira de passer sa carte de paiement devant la machine du fond. Nous partons de bon matin sur les routes en lacet, qui longent la Méditerranée.

On découvre Portofino avant 10h, au calme. Les serveurs installent les couverts du jour, tandis que nous prenons le chemin du château, puis du phare. Après une courte balade, on re-traverse le centre pour 1h30 de randonnée jusqu’à San Fruttuoso et son monastère. Je pensais offrir à mon amie, une escapade intime sans foule au cœur d’une jolie baie sauvage. Que nenni ! Au loin, la plage semble blindée et pourtant il ne me semblait pas avoir croisé autant de randonneurs. Assises sur la plage de galet, dos au monastère, on observe les bateaux qui déversent leur dégueulis d’humains venus, eux-aussi, admirer ce lieu atypique pour un édifice religieux.

Après une courte sieste et un pique-nique à l’italienne, nous faisons chemin inverse, profitant de la fraicheur des arbres après ce bain de soleil. On retrouve Portofino qui s’est bien rempli, entremêlant randonneurs et jet-set.

Il faut serrer des coudes pour monter dans le bus du retour. On finira par retourner à la gare, serrées comme des sardines. Heureusement on arrivera avant la fermeture du supermarché à côté de chez nous, pour profiter d’une soirée tranquille au cœur de Levanto et se délecter une dernière fois de ces aubergines grillées à l’huile d’olive.

Les Cinque Terre : sur ma faim

Un retour en bus pour la France

Le lendemain, j’aurais à nouveau dû prendre un bus de nuit et poiroter 4h en bord de route à Gênes, en plein milieu de la nuit. Je ne sais pas si c’est la pandémie ou si j’ai passé l’âge de telles aventures. Quoi qu’il en soit, j’ai fini par changer mon billet de bus pour un autre de jour.

Je prends donc le train pour Gênes, quittant mon amie assez rapidement pour ce que je me dis être un voyage « plus confortable ». Je profite de ma correspondance pour longer le port et me retrouver face à une foule de touristes en émoi. Il me faut que peu de temps pour faire demi-tour et me réfugier sur le fauteuil qui m’accueillera pour 10h de route. Qu’est-ce que j’imaginais finalement ? Me retrouver en hors saison sans personne ? On n’est plus les seuls à chercher l’authentique, le privilège de découvrir une destination sans peu de monde. Quelle idée finalement ! Je crois que ma vision romantique du voyage est révolu. Du moins, je n’avais pas profité de l’Europe depuis quelques temps. Peut-être que les montagnes m’ont rendu plus rustre ou plus encline à me « réfugier » dans la nature.

Randonnée dans les Cinque terre

Les Cinque Terre finalement, je suis ravie de les avoir parcouru à pied. Cette randonnée itinérante en Italie nous aura permis de s’en approcher doucement. Sous les arbres clairsemés, c’est des senteurs, des clins d’œil à la mer et des plantations à main d’hommes qui nous auront bercé d’illusions pendant une semaine. On ne nous avait pas menti sur les couleurs de Riomaggiore, Manarola, Corniglia, Vernazza et Monterosso al Mare. Mais l’impression que ces cinq villages n’ont plus âmes qui vivent, est restée bien ancrée. À chaque balade, ce sont des appartements en location, des petits bouts de paradis à vendre, des restaurants sans saveurs et des serveurs devant prendre le train de retour chez eux. Heureusement la terre nous permet de voir au delà du tourisme de masse et on se délecte des petites choses parsemant le sentier.

Je quitte l’Italie à moitié assoupie, me réveillant un peu avant la frontière, à temps pour profiter des montagnes lointaines. Un coup d’œil à Monaco et ce sont quatorze années de vie qui défilent par la fenêtre. L’Italie m’aura ramené sur la Côte d’Azur le temps de quelques kilomètres et c’est doucement que je rentrerais chez moi, laissant mes pores s’imprégner encore un peu du voyage.


Comment organiser sa randonnée itinérante dans les Cinque Terre ?

Pour retrouver tous les itinéraires de randonnée dans les Cinque terre en Italie, rendez-vous sur le site : https://www.cinqueterrehike.com/fr/

Pour ma part, j’ai trouvé notre itinéraire de 3 jours de villages en villages, assez équilibré. On profitait de se lever tranquillement le matin, nous laissant le temps d’arpenter les rues pavées brouillées par la pluie de la veille, de nous poser pour déjeuner et d’avancer tranquillement au gré des marches et des plantations en terrasse.

Aller plus loin

Randonner sur l’Overland Track en Tasmanie

Avant de quitter la Tasmanie pour rejoindre Melbourne et laisser l’Australie derrière moi pour toujours, j’accompagnais un ami sur l’Overland Track. Ce trek de 65 km, si on se cantonne à ne pas faire de détour, nous propose de nous enfoncer au cœur de vallées sculptées par les glaciers, de forêts tropicales anciennes, de landes dorées par les buttongrass et de belles prairies alpines. Cette randonnée tasmane a un coût. L’espace naturel étant très fragile, l’accès est limité à 40 visiteurs par jour. Il faut donc réserver en amont, du moins pour la saison estivale.

Je laissais donc toutes mes possessions dans le coffre, sur ce parking que j’avais croisé un an plus tôt. Nous nous tenions à l’entrée du parc national de Cradle Mountain au cœur d’une météo mitigée. Le désavantage de devoir réserver son créneau de randonnée, c’est qu’il devient impossible de décaler en fonction du temps. Nous étions fin mars et l’été nous avait quitté prématurément.

Jour 1 : de Ronny Creek à Waterfall Valley sur l’Overland Track

Nous partions donc en milieu de matinée, après avoir ajusté nos sacs, remplis de denrées pour la semaine. Nos capuches vissées sur la tête, nous avancions de Ronny Creek au Crater Lake. Le « Marions Lookout » ne nous déçut pas, nous offrant des vues presque ensoleillées derrière les gros nuages gris de la matinée, sur la célèbre Cradle Mountain.  

Un an auparavant alors que je donnais un coup de main dans un petit village en autarcie, mes hôtes m’avaient déposé au même endroit afin que je puisse gravir son sommet, haut de 1545 m. Du point de vue, il fallait pousser jusqu’au Kitchen Hut, pour entreprendre ensuite l’escalade de ces gros blocs de pierre arrondis par l’érosion. Seule, j’avais dû lutter contre un vent tenace, afin de ne pas perdre l’équilibre dans ma progression jusqu’au sommet. Remplie de ce souvenir d’aventure en solitaire, je me tournais vers Ben : « Je ne pense pas que nous puissions gravir Barn Bluff aujourd’hui ! ».

Barn Bluff, c’était cet autre sommet, la 4ème plus haute montagne de Tasmanie, qui inondait les photos de ceux qui s’aventuraient dans le coin. Il avait cette forme de pic bien raide, qui semblait être le prolongement du chemin en bois, agrémenté de fil de fer râpeux, qui soutenaient nos pieds. Ce jour-là, le sommet disparaissait sous une immense couche de nuages tristes et épais, nous garantissant une vue vide en haut de ce dernier.

Le terrain était de toute façon humide et nous ne voulions prendre aucun risque dès le 1er jour de notre itinérance. C’était donc confiants, que nous refermions la porte de notre première cabane du soir.

Jour 2 : De Waterfall Valley à Pelion

Le lendemain, la météo n’avait pas changé. Le manteau duveteux était devenu plus dru et nous avancions bien emmitouflés. Les petits lacs semblaient se transformer en grosses flaques dégoulinantes par endroit. Je m’attardais sur les détails. Ceux de mon visage rougi par le froid, celui des baies humides ou encore la végétation changeante et les rares éclaircies. Vers 12h, le temps pluvieux semblait s’apaiser. Les rayons du soleil finirent par éclairer doucement le bout pointu des Gymnoschoenus sphaerocephalus ou « buttongrass ». Ces plantes typique de Tasmanie ressemblait à une touffe d’herbe, mélange de rouge et vert tendre, partant d’un même point. Des buttongrass, nous rencontrions les eucalyptus, puis les landes, avant de plonger dans une ambiance plus alpine. Nous doublions l’étape, pour atteindre ce soir-là la spacieuse cabane Pelion, afin de pouvoir le lendemain entreprendre un détour optionnel, sous une météo plus clémente.

Jour 3 : De Pelion à Kia Ora, en passant par le Mont Ossa

Du Pelion à Kia Ora, il n’y a qu’un pas… et le plus haut sommet de Tasmanie : le Mont Ossa. C’était plutôt sympa comme clin d’œil. « Kia Ora » signifie « portez-vous bien » en Maori et est utilisé pour dire bonjour. Ce bout de Nouvelle-Zélande nous portait chance, puisque le soleil avait décidé de pointer le bout de son nez pour la journée. Ça grimpa rapidement au cœur de la forêt humide, tandis que j’osais à peine happer chaque rayon de soleil qui se faufilaient jusqu’à moi.

Ce fut de Pelion Gap que nous bifurquions. Ce plateau alpin exposé nous offrait des promesses de toute beauté. Comme retombée en enfance, je sautais gaiement de pierres en pierres, qui avaient été posées là pour former un chemin sécurisé sur sol boueux. Si nous devions comparer un pays européen à la Tasmanie, je penserais à l’Irlande, pour ses quatre saisons en une journée quelle que soit la partie de l’année. Le Mont Ossa saisissait de son air d’orgue planté là, telle une cathédrale. Nous avancions parmi les rochers, tandis que la neige parsemait les plus gelés. Hors, nous n’étions pas les seuls ce jour-là au sommet et lorsque mes chaussures mouillées en touchèrent le sol, nous partagions tous un sourire de satisfaction.

Ben et moi déjeunions en altitude avant de redescendre vers notre cabane du soir à quelques heures de là. Je commençais à fatiguer de ces derniers jours froids. Mes nuits précédentes avaient été glaciales et je me réveillais souvent en pleine nuit pour grignoter, car un ami australien m’avait dit « mange pour te réchauffer ».

Jour 4 : de Kia Ora à Pine Valley Hut sur l’Overland Track

Cette nuit-là fut la même. Je me réveillais en sursaut pensant qu’une souris tapait déjà dans mes amandes qui me maintenaient en vie la nuit. Mais les autres randonneurs finissaient toujours par se retourner dans leur sac de couchage alors que je semblais enfin avoir trouvé une position confortable. Le petit matin se levait à peine qu’ils étaient déjà entrain de faire chauffer leur café. Je profitais encore un peu de la moindre pointe de chaleur émanant de mon sac de couchage bien trop fin, avant de m’extirper de là avec la sensation d’avoir passé une courte nuit.

Puis on recommençait à marcher comme la vieille, parmi les flaques parsemant le chemin déjà de boue. Mais à chaque fois la magie revenait. Celui d’un petit détail au détour du sentier, celui d’un bout de mousse irisée, d’un tapis naturel multicolore, entre les eucalyptus qui se déplument.

Jour 5 : de Windy Range à Pine Valley Hut avec l’option Acropolis

A l’aube du cinquième jour, on quittais Windy Range pour Pine Valley Hut, une cabane à une heure et demi de marche de la route principale. Nous l’atteindrons pour 12h. J’avais proposé à Ben, la veille, de monter jusqu’à la montagne Acropolis. Celle-ci est enneigée au sommet et la vitalité me manque à cet instant là. Je laisserais Ben l’atteindre seul, un peu dégoutée de ne pas m’être motivée jusqu’au bout. J’en profiterais pour tenter de faire sécher mes chaussures, mouillées depuis le 1er jour. Ben ravi me ramènera des photos et nous profiterons de notre dernière nuit sur l’Overland Track.

Jour 6 : de Pine Valley Hut au lac Saint-Clair

Nous étions le 3 avril et il était temps d’entamer notre dernière journée de marche, la batterie de mon appareil photo nous laissant seuls à admirer pour la première fois le lac St-Clair. Ben et moi ne voulions pas le traverser en bateau pour atteindre l’autre rive. Nous profitions des derniers instants pour en contourner la rive, doucement, et trouver une voiture pour nous ramener à notre point de départ.

L’Overland Track fut mon premier trek d’une semaine. Il s’en est passé des choses depuis. Même si je chemin n’est pas compliqué en tant que tel, il faut un brin de mental pour affronter la météo capriceuse de ce bout de pays. Ici on ne sait jamais quel temps en aura et ce sera probablement de la pluie. Mes pieds mouillés s’en souviennent. J’étais mal équipée à l’époque et les moyens du bord m’avaient finalement suffit à boucler cette semaine humide. Pendant ces quelques jours en pleine nature, j’avais complètement oublié les péripéties scandaleuses qui venaient de m’arriver (mais ça, c’est une histoire à retrouver un jour dans un livre) et j’étais à nouveau prête à mordre la vie à pleine dent.